Entretien avec un lecteur numérique : partie 2

Suite et fin de notre interview avec Lecteur en colère. Si la semaine dernière, nous avions abordé la lecture numérique, cette deuxième partie se focalisera davantage sur l’aspect technique de son activité car notre homme, en plus d’être un blogueur, réalise gracieusement des ebooks sous le label « LECPublishing ».

Pourquoi avoir ouvert un blog ?

J’ai ouvert mon blog en avril 2011, révulsé par un livre numérique que je venais d’acheter. Au fil du temps, j’ai continué à y exprimer mes coups de gueule. Cela m’exaspère de trouver des ebooks de si faible qualité vendus à des prix exorbitants. Il s’agit d’un blog très ciblé qui s’adresse à une communauté de technophiles familiers du « franglais » et des balises, et non au lecteur lambda.

Mes critiques sont directement formulées à l’égard des éditeurs. Certains sont revenus vers moi comme Numériklivres ou Bragelonne, une maison qui a réussi son passage au numérique et dont j’admire la stratégie, d’autres éditeurs ne m’ont jamais répondu. En tous cas, cela m’a permis de nouer des contacts.

Comment es-tu devenu numérisateur ?

De fil en aiguille, ces contacts ont débouché sur des actions concrètes. J’ai commencé à prodiguer des conseils à des éditeurs et puis tout naturellement, je suis devenu «numérisateur» en leur proposant mes services. J’aide ponctuellement les éditions Numériklivres au niveau du code. Je me suis chargé par exemple de la réalisation au format numérique de la BD Le Plup de Jeff Balek, un auteur que j’avais découvert et apprécié par le passé.

Avec Twitter ou Facebook, les distances et les frontières s’amenuisent. Il est maintenant possible d’entrer en contact avec des éditeurs ou des auteurs, de les relancer et discuter avec eux de ce qu’il convient de faire numériquement pour rendre justice à un texte. Il y a dix ans, vous auriez écrit une lettre qui se serait noyée dans la masse de manuscrits et de courriers quotidiens qui arrivent dans les boîtes des maisons d’édition.

Aujourd’hui, outre la numérisation d’une revue bimestrielle, je réalise également des ebooks pour La Volte, une petite maison d’édition. Leurs publications réclament des ebooks complexes, ce qui représente un vrai défi sur le plan technique. Je nourrissais l’espoir de travailler avec eux parce que j’aime beaucoup leurs ouvrages. La science-fiction et la fantasy, c’est vraiment mon créneau. A la suite de leur première publication numérique, je les ai contactés et tout s’est enchainé.

Comment travailles-tu en tant que numérisateur et quel est ton objectif ?

Je vise le code parfait, lisible sur toutes les plateformes, et le seul moyen d’y arriver, selon moi, c’est de le faire 100% manuellement. Ce n’est malheureusement pas toujours possible, j’en conviens. Cela étant, pour obtenir une numérisation de qualité, je travaille d’abord sur le code et puis, j’entame des phases de béta-lecture, de corrections et de relecture en me concentrant sur le texte et notamment la typographie.

Le texte reste le texte quel que soit le format. Mon objectif est d’arriver à mettre le texte en valeur au format numérique, de le donner à lire sur un support et dans un format qui lui conviennent. Je recherche en somme une adéquation entre la forme et le fond.

Pourquoi le faire gratuitement ?

Par passion d’abord. Mais aussi parce que je n’ai pas envie de développer une activité d’indépendant complémentaire et devoir créer une société. En Belgique, c’est un peu la croix et la bannière, on ne favorise pas l’entrepreneuriat. Mais c’est un autre débat.

Donc, je numérise pour le plaisir. C’est une sorte de défi, il s’agit en somme de repousser les limites du code. Je sais que je ne vivrai jamais de cette activité. En moyenne, je peux consacrer 10 heures par semaine à la numérisation pure mais en même temps, et rien ne m’y oblige, je me charge aussi du suivi car des bugs peuvent apparaître lors du téléchargement sur les sites partenaires. Il n’y a rien de pire qu’un travail gâché par un bug inattendu…

— Stéphanie Michaux

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Stéphanie Michaux

Digital publishing professional