Vendre des livres autrement : oui, mais comment ?

D’accord, Amazon est partout. Cependant, une solution sur mesure pour vous existe peut-être ailleurs ou mérite le coup d’oeil.

À cet égard, le journal The Atlantic recense deux initiatives particulièrement intéressantes.

Un lien entre auteur et lecteur. L’une de ces initiatives est le fruit de la réflexion de Michael Sullivan. C’est l’épouse de ce prolifique auteur américain qui gère l’édition des œuvres de Sullivan à travers différents canaux : à compte d’auteur, chez un géant de l’édition – Hachette ! – et via des éditeurs plus petits, moins connus. Le couple, riche de leur expérience d’écriture et d’édition et suivant de près le débat entre Amazon et Hachette, détaille sur le blog de Michael cette idée : les auteurs devraient pouvoir vendre directement à leurs lecteurs au travers d’un site ad-hoc. Les livres y seraient proposés dans un format compatible avec toutes les liseuses et autres supports. Au fil de leur navigation, les lecteurs auraient l’occasion de découvrir – et d’acheter – des contenus sélectionnés avec soin pour leur qualité. Last but not least, 5% en tout et pour tout seraient prélevés sur chaque vente. Ces 5% couvriraient les frais de fonctionnement, dont l’auteur obtiendrait un relevé détaillé. Michael et son épouse, eux, ne prétendent à aucune rémunération. De cette façon, l’auteur recevrait le montant le plus élevé possible.  Selon Sullivan, avoir un contact direct avec ses lecteurs est aujourd’hui une question de survie pour un auteur. C’est ce même contact direct que la plateforme devrait permettre. C’est aussi ce qui lui confère toute sa valeur ajoutée. L’idée est toute fraîche, elle date de la fin de ce mois de mai : un peu tôt pour mesurer ses chances de succès. On notera tout de même que celui-ci repose sur deux piliers. D’un côté, il y a l’enthousiasme – le dévouement à la cause des lecteurs et auteurs ? – et l’expérience d’un couple. De l’autre, il y a la qualité et l’abondance des contenus : ce sont eux qui attireront et fidéliseront les lecteurs et, du coup, les auteurs. Ou sera-ce le contraire ? À Sullivan et son épouse de choisir soit l’oeuf, soit la poule, en espérant que l’un entraîne l’autre!

Acheter un livre,  partager une expérience. L’autre initiative que The Atlantic met en évidence s’appelle Librify. La jeune société offre aux lecteurs, moyennant un abonnement mensuel d’environ 9 dollars, le livre recommandé ce mois-là ainsi que l’accès aux autres livres de sa bibliothèque à prix réduits. La bibliothèque comporte déjà 500 000 volumes – à titre indicatif, il s’agit de la moitié de ce qu’Amazon offre comme e-books Kindle. Cette start-up voit grand : elle vient de créer un partenariat exclusif avec la chaîne de supermarché Target. Librify espère sans doute profiter des clients, de l’expérience et de la marque Target tandis que la chaîne de supermarché peut ainsi rendre son shopping en ligne plus attirant. Sur Librify, les lecteurs vont seulement trouver des livres choisis à prix réduit. Ils vont aussi pouvoir optimiser l’organisation de leurs cercles littéraires et, en général, profiter d’une expérience de partage et d’un sentiment de communauté, avec d’autres rats de bibliothèque virtuelle. La combinaison sera-t-elle gagnante ? De nouveau, il est un peu tôt pour en juger, la version bêta ayant été lancée en mars de cette année… mais l’initiative est à suivre de près, de l’avis de l’industrie !

Le guichet unique revisité Plus près de chez nous, en Belgique, la maison d’édition numérique Bebooks* s’apprête à lancer également une plateforme de vente en ligne. «Certes, Amazon reste incontournable», admet Julien de Marchin, à la tête du projet. «Mais nous accompagnons des maisons d’édition habituées au papier vers le numérique, nous développons une réflexion stratégique à ce sujet et nous publions des auteurs. Toute cette expérience nous montre que, oui, cela vaudrait la peine d’offrir à nos clients un «guichet unique», un lieu où ils peuvent à la fois numériser et vendre leurs ouvrages». Auteurs et éditeurs rempliront à leur guise la vitrine que Bebooks mettra à leur disposition dès ce mois-ci. Bebooks compte prélever 20% par livre. Aussi, Julien de Marchin espère augmenter la visibilité de Bebooks et ainsi attirer l’attention de clients potentiels sur le reste de son offre – la numérisation pure et simple par exemple.

Ces projets le montrent : il y a toutes sortes de manières de vendre et d’acheter des livres. Suivant l’usage et les contraintes du moment, on préférera l’une ou l’autre. L’essentiel, sans doute, est de ne pas perdre de vue toutes ces autres possibilités qui, en fin de compte, maintiennent le marché en forme!

*La société Bebooks est née en 2013 de la fusion des éditions de L’Aurore et de Libook.

Crédit photo: Librairie « l’usage du monde ».

— Sibylle Greindl

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