Jacques-Line Vandroux : « L’auto-édition pourrait être une menace pour l’édition nativement numérique »

Jacques et Jacques-Line Vandroux, deux pseudonymes bien assortis pour un couple qui s’est lancé dans l’aventure de l’auto-édition. Le sujet est bel et bien dans l’air du temps, comme en témoignent les nombreuses rencontres organisées par Amazon lors du précédent Salon du Livre de Paris. Lettres Numériques a donc décidé de consacrer cette semaine un article à Jacques Vandroux, auteur auto-édité qui rencontre actuellement un beau succès via le programme Kindle Direct Publishing. Rencontre avec son épouse Jacques-Line qui nous livre une vision éclairée de l’auto-édition.

Pourriez-vous nous présenter en quelques mots le parcours d’auteur autoédité de votre mari ? À quel niveau intervenez-vous dans ce projet ?

Nous sommes tous les deux ingénieurs de formation. Mon mari a commencé à écrire lors de ses nombreux déplacements professionnels. Encouragé par plusieurs membres de son entourage, il s’est tourné vers la plateforme Kindle Direct Publishing d’Amazon après avoir été convaincu par une amie. Le succès fut au rendez-vous : son premier roman Les pierres couchées s’est hissé à la première place du top 100 et s’y est maintenu pendant deux semaines. De mon côté, j’interviens pour les corrections des livres de mon mari et anime un blog pour partager notre expérience de l’autoédition. L’idée est ensuite venue de publier ces billets sous la forme d’un livre qui s’intitule Grimpez dans le top 100.

Pourquoi avoir choisi l’auto-édition plutôt que l’édition traditionnelle ?

L’objectif au départ n’était pas d’être publié, mais de prendre du plaisir en écrivant des romans à  partager dans un cercle amical et familial. D’un point de vue pratique, Les pierres couchées est un roman de presque 600 pages. Il aurait été trop compliqué d’envoyer ce manuscrit volumineux à plusieurs éditeurs. Le déclic s’est vraiment opéré quand une amie de mon mari lui a parlé d’une émission présentant l’alternative de l’autoédition. Il s’agit donc avant tout d’un facteur de circonstance.

Jacques Vandroux a-t-il été contacté par des éditeurs à la suite de son succès ?

Le nombre de titres publiés en France est devenu très important, et le marché du livre est aujourd’hui saturé. Les éditeurs sont donc de plus en plus exigeants et il devient difficile de se faire une place dans le monde littéraire. Nous avons bien été contactés par de petits éditeurs mais les propositions ne nous intéressaient pas vraiment. Par contre, l’éditeur Amazon Publishing nous a proposé la publication des traductions en anglais des romans de Jacques, ce qui constitue une belle opportunité pour nous.

Quel est votre avis sur l’édition traditionnelle ? La considérez-vous comme une alliée de choix ou comme un éventuel frein susceptible d’entraver la liberté d’un auteur ?

L’édition traditionnelle est un véritable atout pour aider un auteur au niveau de la diffusion et du marketing de ses livres. Si nous avions eu l’opportunité d’être édités de cette façon, nous aurions foncé sans hésitation. Nous souhaitons également rendre disponibles les romans de Jacques Vandroux en papier. Dans ce cas, je pense que l’édition traditionnelle permet de se constituer plus facilement un réseau de distribution auprès des librairies et autres points de vente.

Selon vous, l’auto-édition pourrait-elle sérieusement concurrencer l’édition traditionnelle ?

Pour le livre papier, je ne pense pas que l’auto-édition puisse rivaliser avec l’édition traditionnelle. Cependant, certains auteurs déçus par les contraintes imposées par leur éditeur pourraient être tentés de choisir cette alternative. D’autres ayant récupéré leurs droits pourraient également l’envisager. La menace est selon moi plus importante du côté de l’édition nativement numérique.

A votre niveau, quelles stratégies de diffusion et de distribution avez-vous mis en place ?

Nous proposons à la fin de chaque titre un récapitulatif du parcours de Jacques Vandroux et le résumé de nos autres publications, afin de fidéliser nos lecteurs et de les encourager à découvrir nos autres livres. Le nombre grandissant de nos lecteurs a d’ailleurs concouru à notre plus large diffusion. Nous accordons également une importance particulière à la couverture, ainsi qu’aux résumés. Enfin, nous privilégions le travail sur les métadonnées et pratiquons des prix bas pour attirer de nouveaux lecteurs.

De quelle manière fixez-vous justement vos prix ? Etes-vous seuls maîtres de cette décision ?

Amazon impose plusieurs contraintes tarifaires : l’auteur perçoit 35 % de son prix de vente pour des publications proposées à moins de 2.99 € et à plus de 9.99 € et 70 % pour celles vendues entre 2.99 € et 9.99 €. Nous avons donc, au début, proposé nos livres à 2.99 €, afin de percevoir une redevance plus élevée. Toutefois, pour donner plus de crédit à nos romans, nous avons augmenté le prix de vente à 3.99 €. Nous nous en tenons là, car nous avons constaté qu’au-delà de 4 €, les publications d’auteurs auto-édités ont des difficultés à se maintenir dans le top 100.

Quelles sont selon vous les principales préoccupations d’un auteur autoédité ?

Nous sommes très attentifs au travail de correction et de relecture. Plusieurs de nos lecteurs nous fournissent d’ailleurs une aide précieuse. Nous sommes très exigeants car nous souhaitons présenter un contenu irréprochable, afin d’éviter de mauvais commentaires sur Amazon dont il est difficile de se débarrasser. Pour nos prochains titres, nous envisageons de faire appel à un correcteur professionnel.

Quels seraient vos conseils pour un auteur qui souhaiterait tenter l’expérience de l’auto-édition ?

L’auto-édition offre énormément de libertés, mais il faut parvenir à accepter la critique car celle-ci peut se révéler très constructive. Faites relire vos productions par un maximum de personnes ! Vous vous constituerez ainsi un réseau qui vous aidera à vous faire connaître. Le résumé doit être soigné, et il ne faut pas hésiter à mettre des petits prix au début pour attirer les lecteurs. Le facteur chance est également important, mais sur ce point, il n’y a pas de recette miracle !

Propos recueillis par E.R.

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— Gaëlle Noëson

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Gaëlle Noëson

Digital publishing professional