Fabien Masson : « Le numérique est un bon complément mais n’est pas la solution à tout »

Retrouvez cette semaine un nouvel article consacré au colloque Erasmus+ « Des écrits aux écrans » du 18 septembre prochain. Penchons-nous cette fois sur la question du numérique comme outil pour l’apprentissage de la lecture et de l’écriture en classe d’alphabétisation. Fabien Masson, coordinateur TIC au sein de la cellule Alpha-Tic de Lire et Ecrire Bruxelles, nous livre son expérience, avec un regard nuancé sur les apports du numérique pour les formateurs et apprenants.

Une réflexion autour de l’alphabétisation

Début 2000, l’alphabétisation des adultes devient une priorité pour les autorités en Belgique francophone. Un plan est alors mis en place et on assiste à une volonté d’accroître le nombre de places dans le secteur de l’alphabétisation. Quelques années plus tard, un groupe de travail spécialisé dans les nouvelles technologies se constitue. Ce groupe se compose de formateurs issus des différents centres Alpha de Lire et Ecrire Bruxelles ainsi que d’un coordinateur de projet.

Fabien Masson explique : « Le groupe de travail a initié une réflexion par rapport à l’utilisation des nouvelles technologies avec les apprenants dans un contexte d’alphabétisation. Le projet a commencé il y a une dizaine d’années maintenant. Depuis, notre réflexion par rapport aux outils numériques a évolué. Nous nous sommes rendus compte que lorsque les ateliers d’apprentissage étaient centrés sur les outils numériques eux-mêmes (ordinateur, appareil photo, etc.), cela donnait finalement peu de résultats. Par contre, les outils de ce type se sont révélés beaucoup plus efficaces en tant que supports d’apprentissage de la langue française. »

Des supports motivants pour les apprenants

Quels sont les outils utilisés comme supports dans le cadre de cet apprentissage ? Fabien Masson témoigne d’une conception assez large des outils numériques envisagés avec des supports informatiques évidents comme les ordinateurs, tablettes, smartphones mais également le développement d’un travail de l’image, du son : « Nous avons notamment mis sur pied un projet de web-radio nécessitant la prise de son, le montage vidéo, la mise en ligne, etc. »

« C’est assez motivant pour les apprenants car il s’agit d’objets qu’ils ont envie d’avoir et de manipuler, comme les smartphones et tablettes, supports que certains d’entre eux possèdent chez eux, mais c’est loin d’être le cas de la majorité. Les personnes qui ont un smartphone ne savent pas forcément l’utiliser » observe Fabien Masson. « Dans le cadre de la manipulation technique des outils numériques, nous avons constaté qu’il était plus simple pour les personnes n’ayant jamais utilisé d’ordinateur de s’adapter à la technologie tactile des smartphones et tablettes. Il s’agit d’une constatation faite à petit échelle. À voir si nous pouvons en tirer de grandes conclusions » poursuit Monsieur Masson.

… mais aussi pour les formateurs !

Le site Web Alpha-Tic a été conçu afin d’outiller les formateurs en classe d’alphabétisation. « Il existe en effet peu de sites de ce type, c’est la raison pour laquelle nous avons choisi de créer une plateforme collaborative via laquelle les formateurs ont l’opportunité de partager leurs expériences et de découvrir celles des autres. Des scénarios pédagogiques sont présentés. L’internaute peut accéder à des ressources et outils différents et se positionner par rapport aux réflexions et enjeux mis en lumière.

Le site est à découvrir à cette adresse : http://www.alpha-tic.be/

Le numérique, un outil parmi tant d’autres

« Il est clair que le numérique est important aujourd’hui. En ce qui nous concerne, dans le cadre de l’apprentissage de la lecture et l’écriture pour des apprenants adultes, nous l’envisageons selon trois axes.

  • Il s’agit d’un outil qui est intégré à l’apprentissage car il fait partie de la société. Nous fonctionnons en permanence avec ces outils et cela devient inévitable.
  • Le numérique facilite l’apprentissage de la langue avec des exercices concrets comme les échanges de mails ou l’alimentation d’un blog par exemple. C’est une véritable source de motivation pour les apprenants.
  • Il permet une réflexion sur la société et les enjeux liés aux nouvelles technologies. Nous sommes aujourd’hui dans un mouvement d’éducation permanente. Nous avons une approche plus distancée des outils numériques et nous nous interrogeons sur les enjeux économiques qu’ils revêtent : la publicité, l’utilisation par les enfants, la question des logiciels libres ou propriétaires, etc. »

Le numérique est-il la solution à tout ? « Les outils informatiques ont leurs limites et ne remplacent pas le formateur ou la lecture et l’écriture sur papier. Il ne s’agit d’ailleurs pas de l’unique support que nous proposons aux apprenants » insiste Fabien Masson. « Le numérique est un outil parmi d’autres, qui vient renforcer l’apprentissage de la langue. Il peut jouer un rôle dans cet apprentissage mais ne va pas régler tous les problèmes liés à l’alphabétisation. »

Retrouvez Fabien Masson et Frédéric Maes lors de la journée du 18 septembre prochain, pour une introduction sur les notions d’alphabétisation, d’apprenants et d’outils numériques. Fabien Masson sera également présent le samedi 19 septembre pour présenter l’initiative Alphatic.

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— Gaëlle Noëson

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Gaëlle Noëson

Digital publishing professional