Internet et le monde de l’édition : le rôle du W3C

À l’occasion de la Foire du livre de Francfort, le Dr Ivan Herman, en charge du pôle technique du W3C (World Wide Web Consortium), a rappelé l’importance d’adapter le monde de l’édition à celui d’Internet, alors que ces deux champs sont encore trop peu compatibles aujourd’hui. Lettres Numériques revient aujourd’hui sur le travail de cet organisme de standardisation, notamment en ce qui concerne l’ePub 3.

Qu’est-ce que le W3C ?

Nous vous en parlions déjà dans de précédents articles : le W3C, qui existe depuis 1994 et a été fondé par l’inventeur d’Internet Tim Berners-Lee, est l’organisme mondial de standardisation des technologies Web. Rejoint en 2017 par l’IDPF (International Digital Publishing Forum, le consortium des professionnels du livre numérique), cet organisme est responsable de la mise en place de la plupart des normes standardisées qui régissent le Web.

Aujourd’hui, le consortium compte environ 480 membres et 65 équipes de travail à travers le monde, au sein de différentes universités telles que le MIT (Massachussetts Institute of Technology aux États-Unis), Beihang en Chine ou encore ERCIM (European Research Consortium for Informatics and Mathematics) en Europe. Il se concentre sur trois missions principales :

  • Le développement d’un écosystème du web, à travers l’étude des utilisateurs, des développeurs et des navigateurs
  • Le développement de nouvelles technologies destinées à l’Open Web Platform (soit tous les outils standards mis en place sur le Web)
  • Le développement d’outils pour des industries spécifiques telles que celle de l’édition

Le W3C agit donc d’abord en tant qu’observateur et gestionnaire de l’open web platform, où les problèmes de sécurité sont nombreux. Pour remplir ce rôle, le W3C coopère avec de nombreux géants du Web, dont Google, Apple et Amazon, mais aussi des maisons d’édition comme Hachette Livre ou Penguin Random House.

epub3

Le rôle du W3C dans le monde de l’édition

En partenariat avec l’IDPF, le consortium a développé une activité directement liée à l’édition : il s’agit de « Publishing@W3C », un ensemble de groupes qui cherchent à poursuivre le développement et la promotion de l’ePub en tant que format accessible de publication digitale pour qu’il devienne, à terme, complètement « web-native ».

Au sein de Publishing@W3C, on distingue trois groupes de travail :

  • Le Publishing Business Group : il donne les impulsions stratégiques et économiques
  • L’Epub 3 Community Group : il se charge de l’élaboration de l’ePub 3.2
  • Le Publishing Work Group

À noter que ce groupe ne concerne pas seulement l’édition en tant que telle, mais aussi les autres utilisateurs du Web. On peut mentionner l’accessibilité offline et la navigation sur les sites.

Comment fonctionne le W3C ?

Le W3C et son fonctionnement démocratique sont peu connus dans l’industrie du livre : les standards de base sont développés par des groupes de travail. Tous les membres du W3C peuvent envoyer des experts au sein de ces groupes, où des chartes fondatrices (reprenant les missions et idées) sont adoptées par un vote unanime. Le travail quotidien est alors effectué pendant des conférences (une fois par semaine), par mails et dans des hubs. Herman soulignait l’importance du consensus dans ces groupes de réflexion qui ne publient aucune recommandation tant qu’un accord global n’a pas été trouvé. De plus, deux autres règles sont appliquées : les recommandations sont testées consciencieusement par des « implementers » et ne restent donc pas au stade d’idées abstraites ; ensuite, en ce qui concerne les documents publiés non libres de droits, les membres acceptent le fait que tous les intervenants puissent utiliser le brevet sans payer aucune charge. Selon le Dr Herman, le développement d’une idée en standard s’étale sur 2 ans à 2 ans et demi lorsqu’il s’agit d’idées déjà bien formulées et structurées. Pour les idées moins bien définies, ce processus prend plus de temps.

La question du mode de paiement

Le mode de paiement doit-il aussi obéir à une forme de standardisation ? Dans la majorité des cas, les paiements sont traités par les plateformes de vente, qui correspondent notamment, dans le monde numérique, à Apple et Amazon. Une question se pose : qui va se charger des nouveaux développements en la matière ? La question de la confidentialité des données joue aussi un rôle important : elle affecte différemment les entités qui ont/qui n’ont pas besoin de connaître leurs utilisateurs.

Le W3C coopère avec des banques afin de créer des standards pour des systèmes de paiement qui proposent une interface plus facile à comprendre pour les utilisateurs. Si une publication sur le Web est librement accessible à tous, le packaging entraîne néanmoins des risques en termes de sécurité. Le W3C ne traite pas directement ces sujets, mais il s’intéresse à la façon dont la blockchain pourrait être utilisée et comment le sujet des données personnelles peut être représenté dans le Web.

La question des métadonnées

Les métadonnées montrent bien en quoi le Web est le futur de l’édition : elles permettent de trouver des textes. Or, c’est un fait, le monde de l’édition travaille beaucoup avec ces informations qui accompagnent chaque livre et se révèlent indispensables pour mener le lecteur jusqu’à l’ouvrage (nous vous en parlions notamment ici). Malheureusement, le W3C ne s’est pas encore intéressé au vocabulaire standardisé et manque d’expertise à ce sujet, s’étant davantage concentré sur le développement des principes fondamentaux. Il est cependant possible d’ajouter des données onyx pour ebooks (au format XML pour les données bibliographiques) dans un environnement Web. D’autre part, si le W3C ne développe pas ses propres métadonnées, il reproduit et partage celles que l’ePub contient.

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— Rédaction

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