Arnaud Lecompte : « Il faut encourager le numérique »

« Qu’est-ce qu’un numérisateur ? » La question revient souvent depuis l’entrée de ce nouvel opérateur dans la chaine du livre numérique. Pour répondre à cette question, nous avons interrogé Arnaud Lecompte, responsable du développement numérique chez Nord Compo, qui procède à la conversion des catalogues des éditeurs papier en numérique. Son travail consiste non seulement à développer ce département, mais aussi conseiller ses interlocuteurs sur les options qui s’offrent à eux avec comme question sous-jacente : comment gérer au mieux le passage d’un contenu imprimé vers un support digital ?

Le numérique, Nord Compo s’y est intéressé très tôt et a très tôt investi dans la recherche et développement. Cette évolution a été anticipée et non pas subie. Même si le pré-presse reste le métier de base de Nord Compo, le numérique prend de plus en plus d’ampleur dans notre société puisque nous travaillons avec la plupart des grands éditeurs parisiens. Lorsque nous nous chargeons du pré-presse, nous fournissons d’emblée une version ePub et mobi à nos clients. C’est une façon pour nous d’encourager le numérique.

Quels changements ou réorganisations le numérique a-t-il induits dans les grandes maisons d’édition ?

Les éditeurs prennent l’habitude de publier la version numérique en même temps que leurs nouveautés papiers. Cela devient quasiment systématique chez les grands éditeurs. De plus, des postes de responsable du développement numérique s’ouvrent dans ces maisons et nous avons de plus en plus d’interlocuteurs de ce type. Les lecteurs s’équipent en tablettes, et la lecture numérique va devenir de plus en plus naturelle. C’est le cours de l’histoire, il faut s’y adapter.

Cela étant dit, certains éditeurs ont aussi une production exclusivement numérique, je pense notamment au projet « L’éveil » que l’on a réalisé pour l’éditeur 12/21. Chaque jour, nous devions produire un nouvel ePub pour le soir même.

Lorsque je travaillais chez Labor, nous avions sorti un livre à la suite de la diffusion de l’émission controversée « Bye Bye Belgium ». Nous avons travaillé sept ou huit mois en amont pour une sortie prévue (non sans mal) le lendemain de la fameuse émission. Si nous avions dû mener ce projet maintenant, il me parait clair que nous l’aurions sorti en numérique pour qu’il soit dans les stores dès la diffusion de l’émission (sans attendre le lendemain). La version aurait même pu être enrichie de vidéo, making off, etc. ; ce que ne permettait pas la version papier.

Pourquoi les éditeurs n’envisagent-ils pas de sortir une version numérique avant la version papier ?

Sans doute pour préserver les ventes des ouvrages imprimés, mais aussi parce qu’ils maitrisent mieux ce circuit de commercialisation. Ils ont une force de frappe bien rodée via leurs réseaux de commerciaux et peuvent toucher plusieurs points de vente avec des opérations différentes.

Dans la chaine de valeurs du numérique, une ou deux personnes décident de la mise en avant de tel ou tel livre. Quand on est une petite maison, il est difficile de sortir de la masse. C’est pour cela que nous accompagnons également les éditeurs dans cette voie.

Par exemple, lors du Salon du Livre de Paris, nous avons organisé un évènement pour une application tirée d’un livre de pâtisserie. Nous avons obtenu des articles ou des reportages dans les plus grands médias. Cette expertise presse et marketing axée sur les circuits digitaux a donné de beaux résultats : l’application était numéro 1 des ventes les jours qui ont suivi. Pour Nord Compo, cela fait partie de l’accompagnement que nous devons offrir aux éditeurs. Pour ceux-ci, c’est important, il faut les inciter à faire du numérique.

Quelles sont vos priorités lorsque vous proposez vos services à un éditeur ?

Chez Nord Compo, nous focalisons nos efforts sur l’interopérabilité. Nous mettons l’accent sur le contrôle qualité et nous vérifions que tous les ebooks que nous produisons soient compatibles avec l’ensemble des tablettes et liseuses disponibles sur le marché. Les éditeurs ne veulent pas dépendre d’un seul acteur, on les comprend. Mais le problème se pose de plus en plus pour l’enrichissement, que l’on parle d’ePub 3 ou d’applications. Tous les appareils de lecture ne les supportent pas et l’on finit par dépendre d’un ou deux acteurs.

Comment vous organisez-vous pour répondre aux différents projets qui vous sont soumis ?

Pour offrir des délais respectables à nos clients, nous avons automatisé certaines chaînes de production et nous avons organisé des « teams » spécialisées par types de projets. Nord Compo emploie 150 personnes réparties par spécialités techniques en différentes cellules. Nous avons, par exemple, des cellules spécialisées dans la littérature générale, d’autres dans les sciences humaines, les livres pratiques, etc.

Quant aux coûts, ils sont variables en fonction des projets, des fonctionnalités, de la difficulté, de l’enrichissement souhaité par l’éditeur.

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— Stéphanie Michaux

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Stéphanie Michaux

Digital publishing professional

One thought on “Arnaud Lecompte : « Il faut encourager le numérique »

  • 26/04/2013 at 21:48
    Permalink

    « Chez Nord Compo, nous focalisons nos efforts sur l’interopérabilité. Nous mettons l’accent sur le contrôle qualité et nous vérifions que tous les ebooks que nous produisons soient compatibles avec l’ensemble des tablettes et liseuses disponibles sur le marché. »

    Quand je lis ça, venant de nord compo, j’ai le rire jaune et très gras…

    À en juger la qualité réelle de leurs livres numériques, qui est proprement scandaleuse, je me demande ce que contrôle qualité signifie pour ce monsieur. Ce n’est qu’un discours de façade, parce que je peux vous dire que leur soi-disant qualité ne prend même pas en compte l’accessibilité aux personnes handicapés, sinon il ferait au moins du html correct et pas une bouillie illisible!

    Merci d’avoir donné la parole à ceux qui posent le plus de problèmes dans le livre numérique en France, et j’aimerais que monsieur Lecompte entende et mène une réflexion par rapport au constat suivant :

    « le jour où nord compo arrêtera de faire du livre numérique, la réalité est que le marché du livre numérique en France se portera mille fois mieux. »

    En attendant, le made in nord compo est la plus grosse daube qu’on peut trouver en France aujourd’hui. Même jouve fait mieux avec ses usines à ePub en Inde…

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