MiLibris, une plateforme qui permet de répondre aux besoins des éditeurs de presse

Avec l’arrivée du numérique, le monde de la presse a dû, comme celui de l’édition, s’adapter aux nouveaux modes de lecture. En ce sens, la start-up française miLibris a mis au point une plateforme de publication et de distribution, permettant aux groupes de presse de proposer leurs contenus via des kiosques numériques. La société travaille déjà avec la majorité de la presse française, mais également de nombreux journaux à travers le monde. Récemment, miLibris s’est lancée dans un projet pédagogique d’envergure (lirelactu.fr) afin de faire redécouvrir la presse aux collégiens et lycéens. Cette semaine, rencontre avec le fondateur, Guillaume Monteux.

Pouvez-vous présenter brièvement miLibris et son évolution depuis sa création en 2009 ?

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MiLibris est une plateforme d’intermédiation entre fournisseurs de contenus et portails de vente permettant de publier des écrits numériques et de les distribuer pour une lecture sur ordinateurs, tablettes et smartphones. À l’origine, miLibris était plutôt orienté livre que presse. Dans le domaine de l’édition de livres, les barrières à l’entrée étaient relativement faibles : à l’inverse d’un journal, si l’on publie un livre à 14 heures au lieu de 9 heures, ce n’est pas un problème. De plus, le PDF utilisé dans la presse est plus complexe à manipuler que le format ePub pour un livre. Enfin, l’industrie du livre est un monde qui fonctionne déjà, pour lequel une transformation est moins urgente. Résultat : nous n’avons pas eu le succès escompté dans le domaine de l’édition de livres. Nous nous sommes dès lors tournés vers la presse. À l’époque, celle-ci ne découvrait pas le numérique mais les journaux n’arrivaient pas à monétiser leurs contenus et leurs sites Web. MiLibris leur a permis de résoudre ce problème. J’ai d’abord frappé aux portes du leader de la presse française L’Équipe, afin de lui présenter mon projet. Finalement, ils ont accepté de travailler avec nous, nous laissant ainsi notre chance.

Comment fonctionne miLibris ? Quelles sont les différentes étapes pour l’éditeur de presse ?

C’est simple : l’éditeur importe son PDF sur la plateforme de miLibris pour être ensuite segmenté en plusieurs articles sémantisés. Les informations sont ainsi séparées (nom de l’auteur, titre, image, etc.) et reprises pour créer deux formats de lecture : le format « réplicable » qui est une version homothétique du PDF et le format dit « 451 » que l’on a conçu, format déstructuré qui présente le contenu du PDF de façon non-homothétique. La plateforme de miLibris est une sorte de tour de contrôle depuis laquelle l’éditeur choisit d’organiser son contenu sous tel ou tel format et exécute sa stratégie commerciale : il peut définir le modèle de monétisation (abonnement, achat à l’acte) et les tarifs qu’il souhaite mettre en place chez les différents canaux de distribution.

Alors qu’à l’époque le numérique était parfois vu comme un concurrent du papier, avez-vous eu des difficultés à convaincre la presse papier de se lancer en numérique ?

Non, car dans la presse, tout revenu complémentaire est pris en considération. En revanche, il existe au sein des éditeurs de presse de vrais freins concernant le numérique. D’abord un frein organisationnel et un frein culturel, les lecteurs de contenus en ligne étant différents des lecteurs qui privilégient le papier. Le support web apporte néanmoins des informations qui peuvent se révéler intéressantes (nombre de lecteurs, profil et habitudes de lecture), données que l’on ne retrouve pas dans le papier. Les gens développent un rapport particulier avec leur journal papier mais également avec leur journal numérique. Avec miLibris, en inventant de nouvelles ergonomies, une nouvelle manière de lire, on crée un rapport particulier entre les lecteurs et les groupes de presse.

miLibris est une plateforme d’intermédiation ouverte et interopérable, qui laisse aux éditeurs le contrôle sur leur catalogue. Pourquoi avoir choisi ce modèle ?

L’interopérabilité, l’ouverture, le contrôle, c’est quelque chose qui est à mon sens fondamental pour les éditeurs et c’est là-dessus que miLibris s’est construite. Au-delà des formats techniques, miLibris n’encaisse jamais l’argent et les données relatives aux usages de lecture appartiennent à nos clients. Nous nous interdisons d’exploiter ces données. MiLibris laisse le contrôle aux éditeurs quant à leur stratégie marketing, leur stratégie de vente, la mise en avant de telle ou telle publication, mais également au niveau de la monétisation. En tant qu’ingénieurs, nous essayons d’innover pour que les éditeurs, face à des sociétés comme Apple ou Amazon, aient plus de contrôle.

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On retrouve également la société miLibris dans un projet pédagogique, lirelactu.fr, qui sera lancé en septembre 2016 en partenariat avec le ministère de l’Éducation nationale. D’où est parti ce projet et quel est son objectif ?

Lirelactu est avant tout un projet personnel. J’ai des enfants et quand je vois ce que disent les jeunes de l’actualité, je suis un peu effaré de la différence entre la perception qu’ils peuvent avoir de la réalité et la réalité elle-même. Les enfants et adolescents s’informent dans les cours d’écoles, à partir de sites web pas toujours fiables dont on ne connait pas les auteurs et peu d’entre eux cherchent à vérifier leurs sources. Le décryptage de l’information s’avère donc extrêmement compliqué. L’idée est donc de permettre aux jeunes de moins de 25 ans de se renseigner auprès de la presse qualifiée. Les journaux seront disponibles dès la rentrée 2016, et ce gratuitement depuis le site lirelactu.fr. Il sera accessible dans l’enceinte de l’école uniquement afin de protéger le contenu des éditeurs. La plateforme proposera des journaux français, allemands, espagnols et belges. Le but est notamment de pouvoir observer comment une même information peut être traitée suivant l’angle éditorial, le pays, etc. Dans un premier temps le site sera déployé dans tous les collèges et les lycées de France, ce qui représente environ 14 000 établissements. C’est un outil pédagogique formidable qui va permettre de rapprocher les jeunes de la presse.

Quels sont vos projets pour 2016 ?

Nous avons de nombreux projets plein la tête. Nous avons ouvert des bureaux au Canada où l’on vient de signer avec TVA publications, 1er groupe de médias canadiens ayant lancé un kiosque de lecture de leurs magazines en illimité appelé molto. Le principe : payer $8,49 par mois pour avoir accès à tous les magazines du groupe et ainsi permettre aux lecteurs de découvrir d’autres types de publications. Nous développons également des projets aux États-Unis.

Elena Burgos

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