Les éditions Luce Wilquin à la découverte du numérique

En octobre dernier, Lettres numériques vous annonçait en exclusivité le partenariat signé entre i-kiosque et les éditions Luce Wilquin pour la numérisation de leur catalogue. C’est aujourd’hui chose faite et les 100 premiers titres sont désormais en ligne. À cette occasion, André Delcourt, chargé du projet aux éditions Luce Wilquin, nous a accordé une interview pour revenir sur cette transition. Un beau défi pour une maison qui fête ses 20 ans cette année.

Depuis combien de temps prépariez-vous cette évolution vers le numérique ?

A.D. : Cela fait maintenant des années que l’on observe le développement du livre numérique même si nous ne tenions pas à être les premiers à emprunter cette voie. On savait que l’on y arriverait un jour, mais nous avons toujours souhaité accorder la priorité à l’édition de nos textes en version papier. Depuis deux ou trois ans, nous envisagions sérieusement de nous lancer dans l’aventure sans vraiment en faire une priorité. Je pense que l’élément déclencheur fut l’arrivée de l’iPad. Son succès a laissé présager une montée en puissance de la lecture numérique. À ce sujet et pour démontrer le changement de mentalités qui est occupé à opérer, un ami me faisait part l’autre jour d’une de ses réflexions : « Chaque année lorsque je me rends au Portugal, j’emporte une quinzaine de livres avec moi, malgré le poids et le coût engendré par le surplus de bagages. L’année prochaine, je partirai sans doute avec une tablette, pour peu que les livres que je souhaite lire soient disponibles aux formats numériques ».

Pourquoi avoir choisi de vous lancer dans le numérique avec i-kiosque ? Comment avez-vous procédé concrètement à la numérisation de vos fichiers ?

A.D. : Nous en sommes arrivés à travailler avec i-Kiosque grâce à notre partenaire français Cyber-scribe, par l’intermédiaire duquel nous avions déjà rendu tout notre catalogue de livres papier disponible sur la base Dilicom (utilisée par les libraires français pour transmettre leurs commandes). Pour nous, c’est une solution clé en main que nous ne pouvions écarter lorsqu’elle nous a été proposée au dernier Salon du Livre de Paris.

La numérisation de nos fichiers, même si elle a été faite en externe, nous a demandé beaucoup de travail. Pendant un mois et demi, nous avons recherché dans nos archives les fichiers d’impression de nos ouvrages. Nous nous sommes assurés de leur qualité et nous avons sélectionné une centaine de titres qui nous paraissaient importants. Nous les avons ensuite livrés cet été à i-kiosque qui a procédé à leur numérisation en même temps que d’autres catalogues d’éditeurs. Par la suite, nous avons eu l’occasion de tester et de valider des échantillons dont nous avons été pleinement satisfaits.

Quels autres services vous propose i-kiosque ?

A.D. : En plus de la numérisation de nos titres, i-kiosque se charge aussi de leur diffusion commerciale. Nos titres sont donc disponibles aux formats pdf et epub sur le site d’i-kiosque, mais aussi de Gallica. Et ce n’est pas tout, à l’avenir, nos livres seront également mis en vente sur d’autres plateformes telles qu’Amazon ou l’ibookstore.

Je tiens à souligner que nous n’avons pas de contrat d’exclusivité avec i-kiosque et que nous restons propriétaires de nos ouvrages au format numérique.

J’ai pu constater que vos titres sont protégés par des DRM*, pourquoi avoir choisi cette option ?

A.D. : Cette mesure de protection de nos fichiers, qui empêche par exemple l’impression de l’ensemble de l’ouvrage, n’est pas la conséquence d’une prise de position absolue. À vrai dire, cette norme relève de la politique d’i-kiosque et était prévue dans notre contrat.

Comment avez-vous supporté les coûts de ce passage au numérique ?

A.D. : Il existe un accord entre la Fédération Wallonie-Bruxelles et le Centre National du Livre pour que les éditeurs belges francophones puissent bénéficier d’aides à la numérisation**. Nous avons soumis un premier lot de 100 titres au CNL pour qu’il puisse juger de la pertinence de notre requête. À la suite de cet « audit », cet organisme a décidé de prendre en charge 2/3 du devis d’i-kiosque. Étant donné qu’il faut compter entre 300 et 500 euros pour la numérisation d’un ouvrage. Cette aide s’est révélée plus que souhaitable et nécessaire.

Est-ce pour cela qu’une centaine de titres est disponible au format numérique alors que le catalogue en compte 450 ?

A.D. : Effectivement, nous avons procédé à une sélection de 100 titres à destination du CNL au mois de juin de l’année passée. Nous sommes repartis des titres les plus récents en sélectionnant ceux qui nous paraissaient les plus importants et nous les avons livrés à i-kiosque à la suite de la décision du CNL. Dans les mois qui viennent, nous procèderons à la numérisation d’une deuxième centaine de titres. En ce qui concerne nos nouveaux titres, nous les publierons désormais au format papier comme au format numérique.

Car si nos nouveautés vont absorber les coûts de leur numérisation,  nous ne savons pas encore quand nous allons rentabiliser la digitalisation de notre fond. Nous sommes donc très prudents dans le choix des titres que nous numérisons pour le moment, car cela représente un investissement. En attendant de numériser l’ensemble de notre catalogue – ce qui est notre ambition première, nous préférons faire des choix stratégiques et mettre en avant des titres pour lesquels il existe une demande ou qui seront remis en avant grâce à une nouveauté.

Comment avez-vous fixé les prix de votre catalogue numérique ?

A.D. : On y a longuement réfléchi et nous nous sommes renseignés sur ce que faisaient les autres maisons d’édition. Les principaux éditeurs littéraires parisiens prônent une réduction de 25 à 35% du prix de vente des livres papier. Nous avons choisi de systématiquement vendre nos livres numériques 30% moins cher que leur version papier.

Comment percevez-vous l’avenir du livre papier et de celui du numérique ?

A.D. : Face à l’arrivée du numérique, nous restons persuadés que le livre papier a toujours une longue et belle vie devant lui. Le livre numérique répondra aux désirs des nouvelles générations amatrices de technologies. Le rôle du libraire, et c’est ma conviction, subsistera car le libraire-conseil effectue un réel travail de proximité très apprécié par le lecteur. Le grand défi est d’arriver à faire en sorte que la vente de livres numériques ait aussi lieu en librairie.

Retrouvez l’offre numérique des éditions Luce Wilquin sur i-kiosque.

* Digital rights management

** Nous vous le signalions la semaine dernière, ces subventions ne sont plus aussi facilement attribuées qu’auparavant.

— Stéphanie Michaux

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Stéphanie Michaux

Digital publishing professional