Amazon Source, un pas vers le libraire, deux pas vers le lecteur

Le nouveau programme Amazon Source, annoncé début novembre par le géant de Seattle, a pour ambition de transformer les libraires indépendants en partenaires pour la vente de liseuses. Loin de faire l’unanimité, ce programme s’apparente pour certains à une blague. Alors que faut-il en penser ? Philippe Goffe, président du syndicat des libraires belges et du PILEn, nous éclaire sur le sujet.

Amazon changes

Le nouveau programme d’Amazon propose aux libraires américains la possibilité de distribuer la gamme Kindle dans leurs magasins. Selon les conditions « libraires » appliquées, les e-readers seront disponible avec 6% de réduction et une commission de 10% sur les ventes d’ebooks générées pendant 2 ans. Et après ?

Il ne faut pas oublier qu’Amazon est le principal concurrent de la librairie dans un marché du livre qui se rétracte chaque année. On est donc en droit de se demander comment évolue le partenariat au bout des deux ans prévus lorsqu’Amazon aura converti nos clients et récupéré leurs données, s’interroge Philippe Goffe.

Amazon n’est pas ce qu’on appelle un bon libraire, mais c’est un excellent logisticien, poursuit le directeur de la librairie GraffitiLorsqu’on a un concurrent d’une telle capacité, on doit s’interroger sur les clés de son succès. Le prix, le stockage, les délais et le transport sont les points forts d’Amazon et nous ne pouvons lutter à armes égales. Il est urgent à cet égard que l’interprofession s’interroge et remette en question certaines de ses pratiques. Éthiquement par ailleurs, cette entreprise me donne des frayeurs ; Amazon gagne en puissance et sa position dominante lui permettra de plus en plus de dicter ses lois au marché. Et si l’on s’y intéresse de plus près, son évasion fiscale, alors qu’elle bénéficie parfois de subventions publiques, et les conditions sociales qu’elle pratique et qui sont dénoncées en Grande-Bretagne, en Allemagne, en France, sont plus que discutables. Dans quel monde voulons-nous vivre ?

Si le projet venait à se développer en francophonie, le président du PILEn exhorte donc les librairies à ne pas rentrer dans le jeu du géant américain même s’il est très bien conçu, mais de se tourner plutôt vers les projets interprofessionnels. Le format propriétaire n’est pas une solution optimale pour le lecteur. Nous avons foi en l’interopérabilité notamment telle qu’elle est pensée par le projet MO3T qui permettra à chaque utilisateur d’avoir sa propre bibliothèque dans le cloud. Un tel projet n’est certes pas facile à mener compte tenu des acteurs publics et privés qu’il rassemble mais nous avançons malgré les obstacles. Le libraire doit s’adapter pour satisfaire sa clientèle. Aujourd’hui, il conseille sur la qualité d’un texte ; demain, il conseillera aussi sur la qualité des fichiers à télécharger. Les libraires belges y travaillent activement.

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— Stéphanie Michaux

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Stéphanie Michaux

Digital publishing professional