Le marché de la musique, quelles leçons tirer pour le livre ?
La journée du numérique de ce lundi 25 novembre, organisée par l’ADEB, Espace Livres & Création et le PILEn et soutenue par la Fédération Wallonie-Bruxelles, commençait par une allocution d’Olivier Maeterlinck, directeur général de la Belgian Entertainment Association. Cet exposé développait un parallélisme entre les secteurs de la musique et du livre à l’ère du numérique avec pour question sous-jacente : quel enseignement peuvent tirer les professionnels du livre de l’évolution de la musique ?
À cette question, Olivier Maeterlinck répond d’emblée : « la musique n’a pas de leçons à donner au livre, l’histoire du livre est bien plus longue et plus complexe que celle de la musique ». Les deux secteurs diffèrent à 3 égards.
- La langue : la musique est en soi une langue universelle.
- Les droits et la relation entre les acteurs : le diptyque auteur-éditeur contre le triptyque artiste-mélodiste-producteur.
- Le support : le livre jusqu’ici a encore un support analogue (ce n’est plus le cas depuis longtemps pour la musique).
Néanmoins, malgré ces spécificités, ces deux industries culturelles sont confrontées aux mêmes enjeux et l’apparition de nouveaux phénomènes : diversification des formats, facilité d’échange au format digital, risque économique de l’investissement, surproduction et phénomène d’auto-édition.
Selon le directeur général de la Belgian Entertainment Association, il y aura toujours un marché physique tant pour le livre que la musique. Même s’ils doivent diversifier les supports, les éditeurs doivent se concentrer sur leurs activités stratégiques : dénicher des talents et offrir des produits culturels de qualité. Cependant face au développement, Olivier Maeterlinck ne peut s’empêcher de constater que l’édition suit les mêmes réflexes conservateurs que la musique car si le téléchargement digital n’a pas tué l’industrie musicale, il l’a profondément transformé. Dès l’apparition de Napster au début des années 2000, le public a massivement changé ses habitudes de consommation en matière de musique. Une évolution en dents de scie que les éditeurs ont eu du mal à anticiper et à maitriser.
Les éditeurs de musique ont fonctionné par tâtonnements et essais-erreurs pour adapter leur offre à la nouvelle économie. Les tentatives ont buté sur de nombreux points qui devraient évoquer quelque chose aux éditeurs :
- les DRM (digital rights management) ;
- la forme : albums, singles, etc. ;
- le prix ;
- le mode de consultation : téléchargements, streaming, etc.
Olivier Maeterlinck insiste sur la nécessité de comprendre le consommateur en ligne, y compris l’internaute qui télécharge les fichiers de manière illégale. Pourquoi le public télécharge-t-il en masse ? Parce que c’est facile ! Si l’on veut lutter efficacement contre le piratage, il faut que les éditeurs soient prêts à se réinventer et pensent en termes d’expérience utilisateur.
Très intéressante à plusieurs points de vue, la conférence ne se voulait pas prescriptive ni moralisatrice mais exhorte les éditeurs à se poser les bonnes questions, notamment sur la gestion des coûts, les possibilités de compenser les pertes par de nouveaux revenus, les moyens de fidéliser leur public. Un conseil précieux pour un marché en pleine mutation.
En effet, si le numérique n’a pas tué les grands groupes de musique dont le pouvoir de certains s’est vu renforcé par des alliances stratégiques avec des opérateurs non-négligeables comme iTunes ou Sportify, il a cependant supprimé le nombre d’intermédiaires. Ce faisant, il a provoqué une réduction de l’intensité des barrières à l’entrée. Résultats ? De nouvelles opportunités pour les indépendants et les nouveaux entrants. Et ce, dans les deux secteurs.
Le powerpoint de la présentation d’Olivier Maeterlynck est disponible à la demande.
Un compte-rendu complet de la journée du numérique est disponible sur le site du PILEn
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— Stéphanie Michaux