Retour du sondage sur l’adaptation des usages des plateformes numériques de la lecture publique lors de la 2e vague de contamination

Alors que la crise sanitaire se poursuit en Belgique, Alexandre Lemaire, responsable de la stratégie, de la conception et de l’évolution des projets numériques visant les bibliothèques publiques au sein de la Cellule numérique du Service de la lecture publique de la FWB, propose un retour sur le sondage concernant l’adaptation des usages des plateformes numériques de la lecture publique lors de la deuxième vague de contamination.

Situation du premier confinement

Lors du premier confinement, nous avions fait le constat d’une importante modification des usages des plateformes numériques de la lecture publique. D’un côté, en raison de l’arrêt du service sur le plan logistique, Samarcande et Périoclic étaient en stand-by. D’un autre côté, grâce à la mise en avant du service par les bibliothèques et les médias, les inscriptions et les prêts sur Lirtuel montaient en flèche : 4 640 inscriptions mensuelles au cœur du confinement (contre 675 en janvier) et 17 185 prêts numériques mensuels (contre 5 810).

Il est également intéressant de relever qu’après le déconfinement et avant le reconfinement partiel d’octobre, le nombre de prêts numériques est resté significativement plus élevé (7 630 prêts mensuels) qu’avant la crise. On ne peut que se réjouir de cet effet durable sur la lecture numérique.

Impact de la deuxième vague

En ce qui concerne le prêt numérique lors de la deuxième vague, on constate bien une augmentation sensible, mais cette croissance ne se révèle pas aussi forte que lors de la première vague. La première vague avait donné lieu à une augmentation des prêts mensuels de 230 %, alors que la seconde a donné lieu à une augmentation mensuelle de 44 % : de 7 630 en septembre à 10 950 en novembre. Cela s’explique sans doute en grande partie par le fait que lors du premier confinement, les bibliothèques étaient fermées, ce qui n’est pas le cas lors du confinement partiel actuel. Il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’une belle croissance.

On retrouve bien dans le graphique ci-dessous représentant les emprunts dans Lirtuel entre le 1er janvier et le 30 novembre le grand pic de la première vague, la belle (mais plus faible) augmentation de la 2e vague ainsi que la « bosse saisonnière » de juillet-août (observée chaque année, les « lecteurs numériques » étant très actifs pendant les vacances d’été) :

sondage bibliothèques 1

Enfin, un statu quo est observé dans l’usage du service Eurêkoi pendant les confinements. Mais ce service n’a pas été davantage mis en avant par les bibliothèques et les médias pendant ces périodes. Il faut dire que la capacité d’absorption d’une forte augmentation de charge sur un court laps de temps est réduite pour Eurêkoi qui dépend d’un réseau de bibliothécaires/médiathécaires répondants peu extensible. Un service comme Lirtuel qui est quasi du self-service présente plus de souplesse pour absorber ce genre de croissance rapide. Le support est néanmoins beaucoup plus sollicité lors de ces pics, évidemment. Les partenaires (opérateurs d’appui et FWB) du consortium d’acquisitions numériques ont en outre produit un bel effort budgétaire afin que les collections suivent.

Des chiffres plus généraux (livres papier, ebooks, autres ressources numériques) reflétant l’effet de la première vague sur les usages en matière de lecture et de numérique (France) se retrouvent ici : https://www.sne.fr/evenement_sne/assises-du-livre-numerique-2020/ (voir « journée du 14 décembre »). Les chiffres du prêt numérique y sont repris et confirment (mais en moins marqué) la tendance observée chez nous lors de cette première vague.

Un sondage pour les bibliothèques

Au début de la deuxième vague, nous avons souhaité effectuer un petit sondage (4 questions) visant à observer les adaptations effectuées par les bibliothèques par rapport aux services liés à ces plateformes. Nous en avons profité pour poser une question plus générale sur les modes d’accès proposés par les usagers dans la mesure où, outre l’intérêt global de la question, cela entraîne une incidence sur les usages numériques. On l’avait par exemple observé de manière spectaculaire lors de la première vague avec l’explosion du prêt numérique à la suite de la fermeture des bibliothèques.

Au-delà de l’observation de la façon dont la crise affectait les services liés au numérique des bibliothèques, le sondage a également permis d’adapter l’action et la communication par le Service de la lecture publique à l’égard de nos plateformes.

Ce sondage a été effectué entre le 5 et le 20 novembre 2020 et a obtenu un taux de réponse élevé (52 %) puisque sur 270 bibliothèques interrogées, 141 ont répondu au sondage.

Question 1 : l’ouverture des bibliothèques et les modes d’accès proposés

sondage bibliothèques 2

On observe que près de la moitié des bibliothèques (39 %) restent ouvertes normalement et un peu plus d’un quart des bibliothèques (28,37 %) donnent accès sur rendez-vous. Parmi celles qui restent ouvertes normalement, il y en a environ 6 % qui ont toutefois adapté leur horaire d’ouverture au public.

Près de la moitié des bibliothèques également (41,84 %) proposent un service de take away. Le terme click and collect est parfois aussi utilisé, mais recouvre une réalité un peu différente car toutes les bibliothèques ne proposent pas ce service via une réservation en ligne. Le sondage ne va pas jusqu’à cette finesse de différenciation, mais on peut penser étant donné la spécificité de ce service, et même s’il s’apparente aux réservations de places dans un espace public numérique, que cela se fait davantage via des appels téléphoniques et inscription du lecteur dans un tableur.

Il faut noter que les réponses ne sont pas exclusives. Une bibliothèque peut très bien avoir répondu qu’elle ouvre normalement et propose un service de take away ou qu’elle ouvre sur réservation et propose un service de take away. On ne s’étonnera donc pas que la somme des pourcentages des bibliothèques soit supérieure à 100, pour cette question.

Dans les précisons des bibliothèques qui ont coché « Autre » (9,22 %), il y a notamment :

  • deux bibliothèques qui ont fermé complètement ;
  • deux bibliothèques qui précisent qu’elles ont mis en place un système de limitation du nombre d’usagers autorisés dans la bibliothèque simultanément ;
  • deux bibliothèques qui ont mis en place ou élargi un service de portage à domicile ;
  • deux bibliothèques qui signalent avoir interrompu le libre accès et mis en place un système d’échange avec les usagers au comptoir et de collecte en rayons par les bibliothécaires des documents souhaités ;
  • une bibliothèque qui relève que le scannage des documents retournés est effectué a posteriori, au terme d’une période de quarantaine (cette pratique doit être fréquente, mais comme ce n’était pas l’objet de la question, elle n’est signalée qu’une fois).

Parmi les éléments qui ressortent de ces données, il faut louer la volonté des bibliothèques publiques de préserver l’accès du public à leurs collections tout en protégeant au maximum à la fois leurs usagers et leur personnel.

Question 2 : le prêt inter-bibliothèques (PIB)

sondage bibliothèques 3

On constate que 44 % des bibliothèques maintiennent le service normal de PIB, la même proportion l’ont interrompu et 12 % l’ont maintenu, mais seulement partiellement.

À la lecture des commentaires et en croisant avec les informations reçues du comité de coordination des PIB, il apparaît que le Hainaut a complètement interrompu le service au niveau provincial et que la Province de Liège ainsi que la Ville de Bruxelles le maintiennent, mais uniquement au niveau de leur territoire. Dans les autres provinces, le service continue complètement.

Il faut noter qu’entre-temps, la province de Liège a annoncé la fermeture de son service de PIB du 19 décembre au 17 janvier, mais pour des raisons sans lien avec la situation sanitaire.

Parmi les commentaires, on retrouve essentiellement des bibliothèques qui relèvent n’avoir pu poursuivre le PIB car elles sont tributaires de la camionnette de l’opérateur d’appui, à l’arrêt sur l’un ou l’autre territoire. Certaines signalent que malgré l’absence de navette, elles continuent néanmoins à s’échanger des livres entre implantations d’un même sous-réseau, communal ou extra-communal (bibliothèques voisines) voire entre bibliothèques plus distantes, mais qui ont l’habitude de pratiquer le PIB ensemble.

On peut donc faire le constat que si le service de base des bibliothèques, le prêt direct, reste quasiment maintenu de manière généralisée (même sous forme restreinte), le prêt inter-bibliothèques se trouve davantage affecté par la situation sanitaire. Cela peut paraître a priori étonnant car il y a vraisemblablement moins de contacts humains requis pour ce genre de service. Mais le fait que les bibliothèques locales dépendent fortement sur certains territoires d’un service d’acheminement centralisé impacte fortement le fonctionnement du service dans les territoires concernés. Le prêt inter provincial (et avec la région bruxelloise) est également affecté, mais dans une moindre mesure étant donné que Samarcande permet de choisir une bibliothèque fournisseuse dans un territoire toujours actif (à condition que le titre demandé se retrouve dans plusieurs provinces).

Un opérateur d’appui qui a restreint le service évoque notamment l’absence de certains membres du personnel (soit malades, soit en quarantaine). Un autre (qui a mis sa camionnette à l’arrêt) relève lui la difficulté de faire fonctionner ce service avec les contraintes de quarantaine des livres (maintenues dans certaines bibliothèques et levées ou réduites dans d’autres).

Question 3 : l’envoi d’articles scannés (repérés dans Périoclic notamment)

sondage bibliothèques 4

On constate que le service est maintenu pendant cette seconde vague (contrairement à la première). Les réponses révèlent un positionnement des bibliothèques en apparence assez semblable à ce qui se passe pour le prêt inter-bibliothèques, mais sans les problèmes d’acheminement puisque les articles sont envoyés par mail.

Toutefois, en parcourant les commentaires ajoutés, il apparaît que de nombreuses bibliothèques soit ne proposent pas ce service aux usagers, soit ne le connaissent carrément pas. Un certain nombre de réponses négatives tiennent donc sans doute souvent au fait que si toute bibliothèque peut rendre ce service, ce sont avant tout les bibliothèques qui conservent les revues qui reçoivent les demandes (voir la liste sur le site perioclic.be).

Il paraît par conséquent raisonnable de penser que la proportion des bibliothèques ayant interrompu ce service soit surévaluée avec ce taux de 46 %.

Certaines bibliothèques signalent par ailleurs que bien que connaissant le service elles ne reçoivent que peu (voire pas) de demandes.

Étant donné ces bibliothèques qui auraient dû répondre « non concernée » si la réponse avait été prévue, le nombre de bibliothèques ayant réellement interrompu le service doit se trouver entre 36 et 46 %. Il est en revanche difficile de dire pourquoi celles qui l’ont interrompu l’ont fait car on ne retrouve rien à ce sujet dans les commentaires. On peut penser d’après les échanges que nous avons eus avec la commission de dépouillement partagé que le manque de personnel présent à la bibliothèque constitue l’une des explications (l’opération de scannage ne pouvant se faire que sur place).

Il ressort par ailleurs du nombre non négligeable de commentaires signalant la méconnaissance de ce service qu’un effort supplémentaire de communication vers les bibliothèques s’avérerait utile.

Question 4 : mise en avant de Lirtuel par les bibliothèques

sondage bibliothèques 5

On ne peut que se réjouir du fait que près de 80 % des bibliothèques mettent davantage en exergue Lirtuel pendant les périodes de crise sanitaire rendant l’accès aux collections physiques plus compliqué voire impossible dans certaines zones.

Cette question a par ailleurs reçu un très grand nombre de réponses à la sous-question ouverte « Pouvez-vous préciser éventuellement comment vous mettez Lirtuel en avant ? ». Parmi les réponses on retrouve :

  • on en parle à nos usagers ;
  • on en parle lorsqu’on prête nos liseuses ;
  • par le biais des signets et affiches envoyées par le SLP ;
  • sur notre page Web ;
  • sur notre blog ;
  • via notre newsletter ;
  • via un mailing à nos usagers ;
  • sur le site de la commune ;
  • sur notre page Facebook ;
  • sur le portail de nos ressources numériques ;
  • via le bulletin communal.

Pour la diffusion sur les réseaux sociaux et les sites Web, certaines bibliothèques précisent qu’elles utilisent les visuels spécifiques à cette situation sanitaire envoyés par le SLP.

À noter que deux bibliothèques considèrent que, comme elles restent ouvertes normalement, il n’y a pas d’intérêt à mettre particulièrement en avant Lirtuel pendant cette période. Gardons toutefois à l’esprit que certaines lectrices et certains lecteurs sont plus réticents à se déplacer en bibliothèque dans les circonstances que l’on connaît et que par conséquent ils pourraient être intéressés par des prêts numériques dans Lirtuel (totalement sans contact).

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— Alexandre Lemaire

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