Table ronde du PILEn autour de la newsletter

« La newsletter – ou infolettre – devient un canal de communication privilégié pour toucher son audience. Elle s’installe comme un rendez-vous régulier, permet de mettre en forme les contenus, d’attirer l’œil sur les actualités et de laisser parler son côté créatif. Exemples, formats et stratégies de communication sont indénombrables. »

Le mercredi 31 mars 2021 avait lieu la table ronde du PILEn autour de la newsletter. La newsletter, également appelée infolettre, revêt plusieurs couvertures. D’outil de communication complémentaire aux médias sociaux à l’objet médiatique, elle peut adopter une forme et un contenu assez libres en fonction des besoins et des envies. Animée par Anne-Lise Remacle (journaliste et modératrice d’échanges littéraires), elle a recueilli les témoignages de Charlotte Heymans (Bela), Victoire de Changy (Les Midis de la poésie) et Amélie Charcosset (La newsletter créative).

Le contenu

Anne-Lise Remacle rentre directement dans le vif du sujet : la newsletter est-elle complémentaire avec le site internet ? Apporte-t-elle du contenu exclusif ?

Selon Charlotte Heymans, la newsletter permet des interactions avec le site internet, de mettre en avant son contenu et de rendre visible les nouveaux éléments. La particularité de la newsletter de Bela est que le nouveau contenu est toujours mis en ligne le vendredi, qui est également le jour d’envoi de la newsletter. La newsletter est donc le point de départ de ces contenus et agit comme un magazine numérique. C’est une autre dynamique de promotion. Victoire de Changy explique qu’avant la crise pandémique, la newsletter servait à annoncer, promouvoir et rappeler les événements organisés par les Midis de la poésie. Amélie Charcosset utilise la newsletter pour partager du contenu exclusif qui ne se retrouve pas sur son site. Selon elle, on n’utilise pas un site, un blog ou une newsletter de la même manière. Même si elle avoue qu’elle devrait utiliser le contenu de la newsletter pour rendre son site plus vivant, elle aime bien le côté éphémère et exclusif de la newsletter. « Tu ne la reçois que si tu es inscrit, ça ne reste pas. »

La périodicité

Ensuite, Anne-Lise enchaîne sur la périodicité de la newsletter, qui va dépendre des besoins. Le plus important est que le rythme soit tenu. Il vaut mieux ne pas envoyer de newsletters trop fréquemment mais de savoir tenir les objectifs fixés.

Le format

Victoire prend la parole en expliquant qu’ils n’utilisent pas de template tout fait, à part le bandeau. Le reste se fait manuellement. Elle part toujours d’un mot-clé en rapport avec la situation du moment et ensuite partage du contenu poétique autour de la thématique choisie. Elle utilise un layout assez simple, car elle n’a pas les moyens financiers ni le temps de faire une mise en page plus complexe. Selon elle, le côté minimaliste a également de l’allure. Victoire insiste que ce n’est pas difficile de créer une newsletter, et que même sans budget, il ne faut pas avoir peur de se lancer. Charlotte explique qu’un template a été créé pour leur newsletter au moment où le site Bela a été refait. Ce template se calque toutefois sur les templates disponibles sur les sites qui permettent de créer des newsletters. L’important, selon elle, est d’utiliser le même code couleur et typo que sur leur site. Elle aime également bien rajouter une animation pour rajouter du dynamisme. Malgré le template créé, elle se permet quand même pas mal de libertés au niveau de la mise en page, de la longueur, etc. Amélie explique qu’elle privilégie également une forme de cohérence avec son site. 

Les différents outils

La fidélité et proximité

Anne-Lise explique que la newsletter est une façon de fidéliser le public et privilégie une certaine proximité. Les newsletters expriment l’identité en tant qu’association, mais permettent aussi d’élargir le cercle et de renvoyer vers d’autres œuvres. Victoire rebondit en expliquant que ça favorise la proximité également au sein de l’équipe même, et permet de créer un lien entre les collègues lorsqu’ils décident de la thématique, proposent du contenu autour de ce mot-clé, etc.

L’interactivité

Amélie explique qu’avant, elle ne pensait pas qu’on pouvait répondre à une newsletter. Maintenant, dans les siennes, elle invite toujours à transférer la lettre ou à y répondre. Elle y joint beaucoup d’anecdotes personnelles sur l’écriture qui permettent facilement aux auteurs en herbe de s’identifier. Elle n’a pas de censure dans ses anecdotes, c’est toujours lorsqu’elle se montre la plus « vulnérable » qu’elle reçoit le plus de réponses et de remerciements. « Ça casse le rapport vertical et ça rassure les lecteurs de savoir que je n’écris pas autant que je voudrais, que j’ai aussi du mal. »

Selon Victoire, la chose la plus difficile avec une newsletter est qu’au contraire des réseaux sociaux, il n’y a pas de résultats immédiats, tels que les likes, par exemple. Cela peut sembler décourageant ; est-ce que ça du sens ? Est-ce que c’est du temps perdu ? « Les retours font toujours du bien, on sent que l’on s’adresse à quelqu’un et c’est indispensable. » Elle reçoit parfois des témoignages ou des conseils. Les retours sont toujours très riches.

Charlotte explique qu’elle ne reçoit pas de nombreux retours et que ce sont les statistiques qui lui apportent des informations sur l’appréciation, le taux d’ouverture, le taux de clic, etc. Elle explique le peu de réponses par le fait que la communauté de ses lecteurs sont interdisciplinaires alors que la newsletter de Bela ne l’est pas car cela ne s’y prête pas. « Il faut réfléchir en fonction du segment qu’on a voulu cibler. » Lorsqu’elle invite à signaler les problèmes, alors là, il n’y a pas mal de retours.

La newsletter vs les réseaux sociaux

Victoire explique que la différence avec les réseaux sociaux est que l’on a plus de possibilités et de libertés avec la newsletter. On peut se permettre de développer le contenu, d’écrire davantage. Charlotte rebondit sur ses paroles en disant que sur les réseaux sociaux, on ne sait pas forcément contextualiser ou détailler la création de certains contenus alors que, sur la newsletter, on peut justifier l’angle d’approche, par exemple. Il s’agit d’un lieu d’écriture plus travaillé, plus sophistiqué. La communication sur les réseaux sociaux se fait de façon ponctuelle, avec des contenus qui pourraient plaire alors que sur la newsletter on ne fait pas la classification, on publie que ce soit léger, approfondi ou interactif, que ce soit un article de fond, une interview ou non. On peut se permettre de publier un peu de tout alors que sur les réseaux sociaux on formate la communication en fonction de ce qui reste, de ce qui plait, de l’algorithme. Avec la newsletter, on n’a pas ce filtre. Amélie explique que c’est plus spontané sur les réseaux sociaux. On va partager en fonction de ce que l’on voit sur le moment. Elle explique également que le contenu de notre newsletter nous appartient. Et elle conclut en approuvant les paroles de ses co-intervenantes en disant qu’elle prend plus le temps de partager et d’expliciter dans sa newsletter.

Les statistiques

Les statistiques permettent de voir le taux d’ouverture, de clics vers le site, etc. Charlotte utilise Camping monitor. C’est juste à titre indicatif. Un bon taux est 20-25%.

Le formulaire d’inscription

Une newsletter demande aussi un formulaire d’inscription. Anne-Lise demande si elles l’ont particulièrement travaillé pour que ce soit plus attractif et amène plus de gens à s’inscrire. Charlotte explique que leur formulaire est très simple. L’essentiel de lecteurs de Bela sont des adhérents ; le candidat accepte ou non de s’inscrire, et cela est expliqué au moment du rendez-vous. Ce travail en amont permet de ne pas en perdre dans d’autres circonstances. Avec de la réflexion, Charlotte avoue qu’elle y mettrait bien autant d’enthousiasme que dans le formulaire d’Amélie : expliquer le contenu, la périodicité, mettre les archives des anciennes newsletters, etc. Amélie explique qu’avant son formulaire était très simple car au début elle ne savait pas quoi mettre comme contenu dans sa newsletter. Maintenant, elle y met les retours positifs et des captures d’écran. 

Toutes les trois affirment que les personnes s’inscrivant à la newsletter doivent confirmer qu’ils acceptent la collection de leur adresse. Toutefois, aucune des trois ne s’en sert ou ne compte les revendre. Et toutes les personnes s’inscrivant à leur newsletter peuvent se désabonner dès qu’elles le souhaitent.

Les archives

Victoire rebondit sur la possibilité de proposer les archives. Elle explique qu’elle adore le concept et qu’elle mettrait bien un onglet « newsletter » sur le site où elle proposerait de relire les anciennes newsletters. Charlotte va dans le même sens. Elle développe en disant que même si le contenu proposé dans la newsletter est sur le site, l’approche de la newsletter est intéressante car elle dépend du contexte actuel. On peut voir l’évolution du site, les coups de cœur d’auteur, etc. en relisant les archives.

La monétisation

En tant qu’institution, est-ce envisageable ? Est-ce que cela prend du temps ? Comment valorise-t-on d’un point de vue financier le contenu ? Amélie explique qu’elle passe par Tipee, une plateforme de soutien au créateur. Les gens payent parce qu’ils ont envie de soutenir son travail de création. Elle y partage les coulisses de l’aventure de l’autoédition dans une newsletter accessible seulement aux gens qui la soutiennent. Il y a donc un contenu exclusif aux abonnés, ce qui fait que plus de monde la soutient ; les gens financent pour du contenu en plus.

Pour Charlotte, la construction de cette lettre conditionne l’éditorialisation du contenu du site. La faire payer, ce serait un double salaire, car ça fait déjà partie de l’organisation de sa semaine. De plus, cette lettre permet d’avoir un rétroplanning assez strict. La lettre d’info fait partie des avantages aux adhérents, ça fait partie du package. Toutefois, elle envisage un service d’accompagnement, des formations coaching payantes qu’elle pourrait proposer en plus de son offre. Victoire considère également que ça fait partie de ses taches. Aujourd’hui, elle trouverait la monétisation inadéquate, même si cela demande énormément de temps. Mais bientôt, elle n’aura plus le temps. Mais avec la crise ça rentre dans le planning. Pourquoi pas le rendre payant par après.

Le temps

Victoire explique que ça dépend. Une de ses collègues met deux à trois jours complets pour faire une newsletter, alors que Victoire prend une demi-journée à la rédiger. Charlotte prend quatre jours mis bout à bout, car la newsletter est envoyée en même temps que les articles sont mis en ligne sur le site. Amélie rédige sa newsletter en deux à quatre heures. C’est du temps qui ne lui est pas facturé, c’est une activité qu’elle fait en plus, donc elle ne peut pas se permettre de prendre autant de temps. Elle dit également ne pas être noyée sous les emails, car elle n’a pas une grande audience. Elle reçoit en moyenne une quinzaine de mails en retour de sa newsletter, ce qui ne lui demande pas beaucoup de temps en termes de réponse.

Le/la rédacteur/rice

Anne-Lise demande si une newsletter pourrait être écrite à plusieurs mains ; est-ce possible ou faut-il une unité de ton ? Victoire avoue que si c’est assumé en début de newsletter et qu’on explicite qui parle, ce serait sensé. Charlotte abonde dans son sens : il faut prévenir et ne pas prendre par surprise, que ce soit dans une seule lettre ou d’une lettre à l’autre. La diversité des voix peut être très intéressante mais il est important de le dire. Amélie l’a déjà fait à plusieurs mains, et au final, cela prend autant de temps que de le faire seule. Il faut être sûr de l’intention et avoir un cadre, sinon on passe plus de temps à éditer qu’à rédiger.

Les conseils

Amélie : « Ce n’est pas pertinent de savoir à l’avance quelle sera la périodicité, quel sera le layout, etc. avant de se lancer. On découvre ce qu’on fait en le faisant. Ça va se créer en fonction du temps qu’on a, ce qui nous plait, les réactions. C’est un test et personne ne s’attend à quelque chose. Ça ne sert à rien de réfléchir trop longtemps avant de se lancer. »

Victoire : « Je suis d’accord. Il faut y aller sans trop cérébraliser la chose, être léger, ne pas se mettre une pression intellectuelle, ne pas se dire qu’on doit produire du contenu irréprochable sinon on ne l’enverra jamais et on prendrait encore plus de temps. Mais si on veut prendre du temps, c’est ok aussi. »

Charlotte conseille de ne pas être pas trop gourmand, trop vite en termes de nombre d’abonnés. Elle déconseille d’aller chercher des abonnés n’importe où, parce que le plus important est de connaitre son public, de l’acquérir progressivement, de le fidéliser et d’avoir des échanges, pour que la lettre soit lue. Sinon, ils se désabonneront directement ou ne liront jamais la newsletter. Charlotte termine en disant que se créer un média avec son univers graphique et ses spécificités est très faciles d’accès. On peut y construire sa propre publication, avec sa propre ligne éditoriale. C’est donc logique que des minorités avec des paroles fortes et engagées s’y emparent. Cela ne sert pas uniquement à promouvoir des évènements, des sorties ou des publications. La newsletter offre des fins énormes, des possibilités infinies.

La formation

Dominique Dufour, journaliste de formation, consultant, professeur, auteur, formateur, passionné par la création au sens large, donne un atelier en ligne et offre un coaching de « 5 jours pour créer votre newsletter » du 26 avril ou 3 mai 2021. La formation se déroulera en 2 temps : « d’abord une partie théorique avec les outils à notre disposition, la ligne éditoriale, la complémentarité, comment tirer le meilleur parti de la newsletter, la notion du temps (cela change la donne, car on prend le temps de lire la newsletter alors que tout va vite). Ensuite, on passera concrètement à l’action pendant 5 jours dans un groupe Facebook où chacun pourra s’exprimer et partager ses publications. »

Les conseils de Dominique : à l’heure des réseaux sociaux, où tout va vite, la newsletter pourrait sembler dépassée alors qu’elle offre un accès plus direct et fidélisé au public ciblé. La newsletter est un outil gratuit et simple d’utilisation. Pour inviter les gens à s’inscrire à votre newsletter, Dominique conseille d’écrire un texte engageant et qui reflète votre identité mais déconseille de ne rien écrire lorsque vous proposez aux gens de s’inscrire. L’importance d’une newsletter commence par son titre. Il faut qu’il soit accrocheur pour que les abonnés aient envie d’ouvrir le mail.

En conclusion

La newsletter est certes un outil qui demande de l’investissement et de l’organisation, mais elle est essentielle pour communiquer avec sa communauté. Bien utilisée, elle reste un canal de communication important et pertinent, dans une société où nous sommes rivés sur notre Smartphone et où les informations défilent à toute allure.

Lettres Numériques participera également à la formation donnée par Dominique Dufour, organisée par le PILEn. Un compte rendu de cette expérience sera partagé également sur le site, dans l’optique de vous partager les meilleurs conseils, et d’améliorer votre propre newsletter !

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— Emiline Gambacorta

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