Laurent Le Meur : « La possession d’un ebook est beaucoup moins illusoire avec la DRM LCP qu’avec d’autres DRM »

Comme annoncé la semaine dernière, Bruxelles accueillera prochainement la deuxième édition de l’ePub Summit, organisé par l’EDRLab, siège européen de la Fondation Readium. Pour l’occasion, Lettres Numériques vous livre une interview de Laurent Le Meur, directeur technique de l’EDRLab.

Pourriez-vous rapidement présenter l’EDRLab et  résumer votre mission en tant que directeur technique ?

laurent_le_meurL’EDRLab est un laboratoire de développement qui travaille au déploiement en Europe d’une technologie de publication numérique ouverte, en mettant l’accent sur des solutions interopérables et accessibles. Aujourd’hui, notre équipe compte cinq membres et nous sommes également l’antenne européenne de la Fondation Readium.

En tant que directeur, j’assure la gestion de l’association ainsi que son développement. En tant que directeur technique, je pilote les développements de logiciels créés en partenariat avec Readium. L’une des grosses missions de l’EDRLab est notamment de préparer une fois par an une série de conférences autour de la promotion du format ePub. Cette année, nous avons choisi d’organiser l’ePub Summit en Belgique, mais nous changerons certainement de pays l’année prochaine afin de continuer notre travail à travers l’Europe.

En décembre 2015, votre collègue Cyril Labordrie mentionnait deux projets principaux : le développement de la DRM LCP ainsi que la stabilisation de l’ePub 3.1 (pour relire l’interview complète, c’est ici). Aujourd’hui, où en sont ces deux projets ?

Au niveau du développement technique, les deux projets sont aujourd’hui terminés. L’ePub 3.1 a d’ailleurs été validé par l’IDPF à la fin de l’année 2016. Nous continuerons à travailler aux futures versions du format, qui seront développées au sein de W3C (pour rappel, l’IDPF et W3C ont annoncé leur rapprochement l’année dernière).

Concernant la DRM, les développements ont duré toute l’année 2016 et sont maintenant finis également. Maintenant, nous attaquons la phase de lancement et l’ePub Summit sera l’occasion pour nous de faire les premières démonstrations de la solution. Cela nous permettra de mettre en avant son interopérabilité grâce à la participation d’acteurs différents.

Pensez-vous que l’ePub 3 se justifie pour tous types de contenus et doive être favorisé face à l’ePub 2 ?

Il se justifie pour toute publication numérique, notamment pour tout ce qui est encore publié au format PDF à l’heure actuelle. Il a l’avantage de permettre l’enrichissement multimédia et l’interaction.

L’ePub 2 n’est pas obsolète puisqu’il peut être lu par les applications de lecture conçues pour l’ePub 3. De notre côté, nous conseillons aux acteurs du numérique de passer au format ePub 3 car celui-ci est aujourd’hui supporté par la plupart des appareils de lecture. Même au niveau des liseuses, certaines sont compatibles, notamment les liseuses PocketBook et Kobo. Bien sûr, la lecture d’un ePub 3 enrichi sur une liseuse entraîne une dégradation de l’expérience et le lecteur y perd en confort de lecture.

Concernant LCP, comment envisagez-vous la propagation de cette DRM sur les réseaux de vente ?

Là aussi, nous proposons une solution technique pour laquelle nous tentons d’enlever les barrières à l’adoption : on publie les spécifications, on facilite la mise en place en proposant du logiciel open source et on communique le plus possible autour de la solution. Nous essayons également de la rendre attractive financièrement. À l’heure actuelle, nous avons déjà été contactés par plusieurs sociétés qui sont intéressées par notre solution. À terme, notre objectif est de la faire adopter à travers le monde, en commençant par les bibliothèques, qui sont les premières concernées par ce type de protection.

The Ebook Alternative avait développé sa DRM CARE en se basant sur votre technologie. Les deux solutions vont-elles cohabiter ?

Justement, ils sont actuellement en train d’adapter leurs spécifications afin d’adapter leur DRM à la nôtre et ils seront donc bientôt parmi les premiers à intégrer la DRM LCP à leur écosystème.

Pour l’utilisateur, il n’y aura aucun problème pour les ebooks achetés avant la mise au point. L’ePub Summit sera également l’occasion d’aborder le sujet.

Pourriez-vous rapidement rappeler les avantages de votre solution LCP face à la DRM Adobe ?

  1. Du point de vue utilisateur, on simplifie l’accès au livre: plus besoin de s’inscrire sur un site tiers et de passer par plusieurs étapes avant de pouvoir entamer sa lecture. On enlève de cette façon un gros frein à la lecture ;
  2. Pas d’interdiction de partager son ebook de manière familiale: l’ebook peut être passé d’un appareil à un autre de manière simple du moment qu’il ne s’agit pas de piratage. En effet, la solution LCP ne bloque pas le prêt même si elle permet de surveiller le nombre de partages. En pratique, nous pouvons donc rapidement identifier les tentatives de piratage puisque nous savons combien de fois le livre est partagé. Le partage est donc contrôlé et limité, mais l’utilisateur qui souhaite prêter son ebook de manière familiale ne ressentira aucune contrainte. On se situe entre la DRM « dure » (celle d’Adobe, par exemple) et le watermark (ou tatouage numérique) ;
  3. L’archivage et la possession d’un fichier numérique sont beaucoup moins illusoires qu’avec d’autres DRM actuelles : la DRM LCP est durable dans le temps. Si je veux mettre de côté mon livre et le relire 10 ans plus tard, je n’aurai aucun problème de compatibilité, quel que soit mon nouvel appareil de lecture compatible ;
  4. Aucune fuite de données personnelles pour l’utilisateur.

Pour rappel, l’ePub Summit aura lieu à Bruxelles les 9 et 10 mars prochains. Il reste encore quelques places, n’hésitez donc pas à vous inscrire ! Toutes les informations se trouvent ici.

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— Mélissa Haquenne

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Mélissa Haquenne

Digital Publishing Professional