Comment animer un cercle littéraire… en ligne?

L’exemple des cercles de discussion littéraires initiés par Publishing Perspectives.

Le site américain Publishing Perspectives fait le point sur le monde vaste, mouvant et complexe de l’édition. Rien n’échappe à sa veille attentive, ni les mouvements des grands groupes du secteur, ni les bonds technologiques, ni les marchés où le numérique émerge.

Un rédacteur qui contribue régulièrement à Publishing Perspectives, Dennis Abrams, a lancé un cercle de discussions en ligne en novembre 2009. Le sujet de ces cercles de discussions ? Le cœur du monde de l’édition : le livre itself ! En l’occurrence, zoom sur quelques monstres sacrés de la littérature : Proust, Dostoïevski, Shakespeare et le contemporain Murakami ont été lus – par chapitres ou par actes – par des centaines de lecteurs pendant des mois, qui sont devenus des années. Ce chœur de lecteurs a été guidé par les commentaires de Dennis Abrams, d’autres critiques et le reste de la communauté de lecteurs. Dennis Abrams nous a raconté, lors d’une interview à distance, le pourquoi et le comment de cette initiative 100% littéraire, dans un journal autrement dédié à une veille plutôt économique et technologique.

Comment cette idée d’un cercle littéraire est-elle apparue chez Publishing Perspectives ? C’est en fait une idée du rédacteur en chef de Publishing Perspectives, Edward Nawotka. C’est un ami, nous habitons à quelques rues l’un de l’autre. Un jour que nous déjeunions ensemble, et parlions de ce que nous étions en train de lire, je lui ai dit que je m’apprêtais à lire Proust une seconde fois. Il m’a demandé ce que je penserais de le relire dans le cadre d’un cercle de lecture en ligne. J’y ai pensé quelques instants et réalisé que j’adorais l’idée. Quelques semaines plus tard, le cercle littéraire était né !

À qui ce cercle littéraire s’adresse-t-il ? Quand j’ai démarré avec Proust, je n’avais aucune idée de qui me lirait… ni même de si quelqu’un me lirait ! Mais un public était là, de tout âge et venu de tous les horizons. Tous ces gens voulaient s’approcher de ces monstres sacrés de la littérature mais étaient trop intimidés pour s’en approcher tout seuls.

Comment avez-vous créé et maintenu l’intérêt parmi les participants à ces cercles littéraires ? Ça, c’est la question-piège ! Pour Proust, Dostoïevski et Shakespeare, j’ai posté deux à trois fois par semaine et partagé avec les lecteurs non seulement ce que je retirais de ces lectures mais aussi ce que d’autres en avaient retiré : c’est ainsi que j’offrais une diversité de voix et d’opinions aux lecteurs. Pour Shakespeare, j’ai pu intégrer à mes commentaires des vidéos, des peintures, des images de différentes représentations de son oeuvre.

Pourquoi cet accent sur des auteurs, plutôt que sur une œuvre spécifique ?C’est ainsi que je lis : quand je m’approche d’un « grand auteur », j’aime de lire un maximum de leurs œuvres et dans l’ordre chronologique. C’est ce qui me permet de voir leur évolution en tant qu’écrivains. Tout ce travail – relire de plus près ces auteurs, écrire ce que j’avais pensé d’eux et partager ces écrits, en compagnie des points de vue d’autres auteurs et critiques – a fait de moi un meilleur lecteur.

Pourquoi le contemporain Murakami après tous ces classiques, consacrés par les siècles? Vraiment, j’avais besoin d’une pause. Le projet Shakespeare « The Play’s The Thing » a pris deux ans et demi – bien plus que ce que j’aurais cru au départ ! Pas que je le regrette une seule seconde… Mais après ça, je me suis dit qu’un auteur moderne serait un changement bienvenu, pour moi mais aussi pour « mes lecteurs » qui m’ont, pour beaucoup d’entre eux, suivi d’un auteur à l’autre.

Bref, l’initiative est venue par et pour des enthousiastes des livres, et a ainsi trouvé son public ! Si vous voulez le voir de vos yeux, c’est par ici et en anglais…

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Propos recueillis et traduits par Sibylle Greindl

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— Sibylle Greindl

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