Net Galley : un outil interprofessionnel de recommandation et de partage

Ce n’est pas nouveau : le numérique offre de nombreuses opportunités pour les éditeurs, parmi lesquelles l’envoi de services de presse instantanés et moins coûteux qu’en papier pour assurer la promotion de leurs nouveautés (voir notre précédent article sur le sujet). Les fondateurs de NetGalley se sont penchés sur la question et ont ainsi développé une plateforme qui permet aux éditeurs de transmettre de manière sécurisée épreuves et services de presse à des lecteurs professionnels et/ou influents. Stéphanie Chabert, Community Manager chargée des relations avec les éditeurs pour NetGalley France, nous en dit plus sur cet outil de partage, qui a récemment débarqué sur le marché francophone.

Le projet

NetGalley a vu le jour aux États-Unis. Après avoir conquis les éditeurs indépendants, la plateforme s’est enrichie de structures plus importantes comme Hachette, Harper & Collins, etc. Aujourd’hui, ce sont près de 350 éditeurs situés aux USA, au Royaume-Uni, en Australie et au Canada qui ont adhéré au concept. Stéphanie Chabert explique : « Il y a un an, Susan Ruszala de NetGalley LLC, a rencontré Hadrien Gardeur de Feedbooks. Ensemble, ils ont décidé de se lancer dans une coentreprise et, en juin dernier, NetGalley France faisait son apparition sur le marché francophone. »

Comment fonctionne NetGalley ? Les lecteurs, qu’ils soient professionnels (libraires, bibliothécaires, journalistes, documentalistes, enseignants, critiques) ou influents (blogueurs), doivent tout d’abord se créer un profil pour pouvoir ensuite introduire des demandes d’épreuves ou services de presse auprès des éditeurs participants. Une fois les demandes analysées et validées par les éditeurs, les lecteurs reçoivent le ou les titres en numérique pour lesquels ils ont introduit une demande. « NetGalley est un outil interprofessionnel qui permet la recommandation et qui invite aux échanges et partages au sein d’une communauté de lecteurs » souligne Stéphanie Chabert.

Quels utilisateurs ?

« Nous comptons chaque jour de nouvelles inscriptions sur la plateforme parmi lesquelles des utilisateurs français, belges, suisses et québécois. Après dix ans d’existence du côté anglophone, la communauté a atteint près de 230 000 membres, actuellement actifs. Du côté francophone, nous en sommes aujourd’hui à 2000 inscrits. Nous verrons comment cela évolue dans le futur mais il semble que nous soyons sur la bonne voie. »

Stéphanie Chabert observe que les premiers intéressés par le concept aux États-Unis sont les blogueurs qui ont plus de difficulté à accéder aux textes et épreuves des éditeurs. Viennent ensuite les bibliothèques, séduites par la facilité d’accès de NetGalley. « Au niveau anglophone, nous constatons un intérêt plus faible pour les journalistes mais, encore une fois, nous verrons comment cela se présente au niveau francophone. Il s’agit pour eux d’une alternative intéressante aux services de presse traditionnels car ils se trouvent plus souvent dans une situation d’urgence et de nécessité par rapport aux libraires ou bibliothécaires qui préparent leurs lectures plus en amont.

Quels éditeurs ?

Une certaine réticence a été observée du côté des éditeurs, liée à la problématique du piratage des services de presse. Mais globalement, Stéphanie Chabert constate une réelle évolution de ce côté-là, avec des éditeurs plus réceptifs, et cela pour deux raisons.

  • Aspect financier : les services de presse sont en effet très coûteux. NetGalley permet de toucher un public plus large, tant de professionnels que de blogueurs.
  • Aspect communautaire : le « Community Manager » est devenu un poste-clé qui se crée de plus en plus dans les maisons d’édition. NetGalley permet de simplifier le travail de l’éditeur à ce niveau-là.

Stéphanie Chabert souligne : « Nous accueillons à ce jour les catalogues du groupe Hachette, partenaire historique de notre homologue américain, mais aussi les titres de la rentrée d’Editis. Nous travaillons également avec un éditeur indépendant : Allary éditions. Nous poursuivons notre action de communication auprès des relais ».

Comment vaincre les lecteurs mal intentionnés ?

« C’est une bonne question » répond Stéphanie Chabert. « Nous y avons beaucoup réfléchi car il peut toujours y avoir des gens attirés par la gratuité du service. Cependant, l’éditeur est le seul à pouvoir valider une demande, grâce au profil du lecteur qui l’introduit. En effet, pour s’inscrire, ce dernier doit rédiger une courte biographie et décliner son identité. Cela nous permet de tracer les utilisateurs. Nous réalisons d’ailleurs des vérifications régulières sur le site afin de détecter les éventuelles pratiques frauduleuses. De même, l’éditeur nous avertit lorsqu’il y a un problème. »

Stéphanie Chabert insiste sur le côté professionnel de NetGalley et sur les interactions riches qui naissent entre les éditeurs et les lecteurs. « Les éditeurs reçoivent un feedback des utilisateurs ayant lu leurs ouvrages. C’est un véritable partenariat qui se crée. » Pour assurer la sécurité des fichiers, l’éditeur peut également choisir d’apposer un verrou numérique sur ses ebooks, qu’il s’agisse de DRM permanentes ou chrono-dégradables. « Nous avons conscience que le processus d’Adobe Digital Edition demeure complexe pour le lecteur. C’est la raison pour laquelle nous ne forçons pas l’éditeur à l’adopter et envisageons plutôt la mise en place d’un tatouage numérique (watermarking) qui permettrait de tracer le lecteur malveillant » poursuit Stéphanie Chabert.

Dépôt et archivage

En général, les éditeurs mettent en ligne leurs épreuves entre 3 et 5 mois avant la date de parution du livre. Cela dépend de la stratégie adoptée par l’éditeur. « Nous les poussons à mettre en ligne plus en amont leurs ouvrages afin de donner plus de temps aux prescripteurs pour la lecture des ouvrages. Certains éditeurs choisissent ensuite d’archiver les titres à partir de la date de publication, alors que d’autres les laissent parfois durant deux semaines/un mois après leur sortie. » Finalement, y a-t-il autant d’épreuves que de services presse proposés aux lecteurs ? « Nous nous trouvons dans une situation de continuité. Ainsi, il s’agit d’épreuves dans les premiers mois, mises à la disposition des prescripteurs. Une fois la date de publication passée, l’éditeur télécharge le fichier définitif qui devient alors un service de presse. C’est pour cela que certains titres sont proposés dans un premier temps au format PDF puis aux formats ePub et mobi, une fois la dernière épreuve approuvée » explique Stéphanie Chabert.

Les éditeurs ne proposent pas tout leur catalogue sur NetGalley, sauf au moment de la rentrée littéraire. Un maximum d’épreuves sont mises en avant mais, pour les éditeurs indépendants, la stratégie est plutôt au titre à titre. Stéphanie Chabert explique : « l’éditeur peut choisir le forfait illimité pour l’ensemble de ses titres, ou le forfait intermédiaire pour activer un nombre déterminé de titres. Chaque éditeur a sa propre stratégie financière de ce point de vue.

À lire dans notre dossier spécial Lecture sociale :

Retrouvez Lettres Numériques sur Twitter et Facebook.

— Gaëlle Noëson

Share Button

Gaëlle Noëson

Digital publishing professional