2015, l’année de l’auto-édition ?
L’auto-édition n’en finit plus de faire parler d’elle. Dévalorisée par certains, crainte par d’autres, elle a pourtant continué son bonhomme de chemin depuis l’apparition de Kindle Direct Publishing en 2007 et, si elle représente encore une part mineure du marché, elle semble toutefois se faire une place dans le paysage actuel de l’édition. Cette semaine dans Lettres Numériques, nous vous proposons un état des lieux de ce phénomène en pleine expansion.
À l’heure actuelle, l’auteur désireux d’autopublier son livre a l’embarras du choix : alors que toutes les plus grandes plateformes telles qu’Amazon (Kindle Direct Publishing), Apple (iAuthor) ou encore Kobo (Kobo Writing Life) disposent de leur plateforme d’auto-édition, on en retrouve également à l’échelle nationale. Prenons le cas de l’Allemagne, où Tolino vient à nouveau perturber l’empire de Jeff Bezos en lançant sa propre plateforme d’autopublication, Tolino Medias, dont les premiers retours promettent une belle évolution. Pour la petite histoire, rappelons que selon le Global ebook Report réalisé par Gfk en 2014, Tolino avait rattrapé Amazon en termes de parts de marché chez nos voisins allemands.
Doucement, mais sûrement
Considérée de prime abord comme un mouvement mineur, voire anecdotique, l’auto-édition s’impose chaque jour un peu plus et les success stories s’enchaînent : Rachel Abbott, Aurélie Valognes, Jacques Vandroux, Amélie Antoine pour ne citer qu’eux, prouvent la pertinence et le potentiel de la démarche. Si leur succès s’explique notamment par les prix très démocratiques appliqués à leurs livres (un livre autopublié ne dépassant généralement pas les 4,00 €), on peut y voir également la mise en place d’une réelle communauté d’auteurs et de lecteurs. La création par trois écrivains du label indépendant Bad Wolf, « La fantasy méchante et indépendante », illustre également bien la solidarité présente entre les différents auteurs. En effet, les auteurs auto-édités devant normalement prendre en charge la promotion de leurs œuvres, nombre d’entre eux ont lancé leur blog afin de permettre aux lecteurs de suivre leur parcours. Enfin, la fidélisation du lecteur passe aussi par le travail sur le paratexte, comme nous l’expliquait récemment Jacqueline Vandroux : « Nous proposons à la fin de chaque titre un récapitulatif du parcours de Jacques Vandroux et le résumé de nos autres publications, afin de fidéliser nos lecteurs et de les encourager à découvrir nos autres livres. Nous accordons également une importance particulière à la couverture, ainsi qu’aux résumés. Enfin, nous privilégions le travail sur les métadonnées et pratiquons des prix bas pour attirer de nouveaux lecteurs. » (Pour retrouver l’interview complète, c’est par ici).
L’auto-édition peut également représenter un beau tremplin, puisqu’elle permet à des auteurs débutants de se faire une première expérience et, en cas de succès, de se faire remarquer pas des maisons d’édition
Une médiatisation accrue
Cette année, beaucoup d’événements auront mis en avant le milieu de l’autopublication, à commencer par de nombreuses conférences et rencontres lors du Salon du Livre de Paris, qui a également marqué le lancement de la plateforme Iggybook, entièrement dédiée à l’accompagnement des auteurs auto-édités ainsi qu’à la promotion de leurs œuvres (voir notre précédent billet). Cette année, le nouveau venu marque le coup en organisant la première rentrée des Indés (dont nous vous parlions la semaine dernière). Organisé en octobre, il s’agit là d’une belle occasion pour les auteurs autoédités de se démarquer du raz-de-marée de livres qu’engendre la rentrée littéraire. Dans la même veine, on retrouve le prix de l’auto-édition, organisé cette fois par Amazon et sa plateforme Kindle Direct Publishing, qui sera également remis en octobre. Là aussi, le gagnant bénéficiera de la mise en place d’un dispositif marketing visant à accroître sa visibilité.
Le monde de l’auto-édition bénéficie donc d’une visibilité accrue ces derniers temps et cette pratique semble prometteuse pour les nouveaux auteurs désireux de se lancer. Attention toutefois : si ce marché a ouvert une nouvelle porte aux auteurs et a engendré la création de nombreuses plateformes qui lui sont entièrement dédiées, il reste toutefois très réduit en termes de parts de marché et la rémunération qui découle de ce modèle n’est pas toujours avantageuse pour les auteurs. En effet, si l’on considère les prix bas appliqués à ce genre de publications, en plus de la commission prise par les plateformes, les bénéfices reversés à l’auteur peuvent parfois s’avérer minimes. Et si certains auteurs tirent leur épingle du jeu et parviennent à se faire un nom, ils ne représentent malheureusement qu’une minorité.
À relire sur Lettres Numériques :
- Iggybook : accompagner les auteurs auto-édités dans la promotion de leurs oeuvres
- Jacques-Line Vandroux : « L’auto-édition pourrait être une menace pour l’édition nativement numérique »
- Cécile Chabot : l’auto-publication pose le débat de la légitimité
- Qui fait la loi au pays de l’auto-édition ?
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— Mélissa Haquenne