Mise en ligne d’écrits et dessins kafkaïens pour le grand public

Le Procès et Les Métamorphoses résonnent toujours chez ceux qui ont approché de près ou de loin les œuvres de Kafka. Écrivain austro-hongrois de langue allemande et de religion juive, né le 3 juillet 1883 à Prague et mort le 3 juin 1924 à Kierling, il est considéré comme l’un des écrivains majeurs du XXe siècle. C’est d’ailleurs son importance littéraire qui aura entraîné une bataille ironiquement juridique pour l’obtention des ayants droit de lettres et de dessins inédits de l’auteur.

Un peu d’histoire…

Rappelons-nous qu’à la mort de Franz Kafka, il y a près d’un siècle, en 1924, l’auteur décide de confier à Max Brod un certain nombre de lettres et de dessins lui appartenant. Avec cet autre écrivain et journaliste, les deux étaient des amis très proches, à tel point qu’avant son dernier souffle, rongé par la tuberculose, Kafka fit part à Brod de son dernier souhait : qu’il brûle absolument tous ses écrits.

L’histoire nous apprendra que cette volonté prononcée dans un sanatorium autrichien n’a jamais été exécutée. En effet, Max Brod a pris la décision de ne pas détruire les productions de son ami qu’il protégea dans un premier temps lors de la Seconde Guerre mondiale. En 1939, Brod quitte la Tchécoslovaquie occupée par les nazis et se rend alors à Tel-Aviv, embarquant dans son périple les dessins et écrits kafkaïens qu’il peut. Malheureusement, ceux qu’il n’arrive pas à récupérer seront détruits par la Gestapo. Plus tard, Max Brod a publié de nombreuses œuvres de Kafka. De cette manière, il aura contribué à la célébrité posthume de son ami et figure littéraire emblématique du siècle dernier.

Depuis le mois de mai 2021, plus de 200 lettres manuscrites et environ 120 dessins inédits de l’écrivain juif tchèque Franz Kafka ont été scannés et mis en ligne pour le grand public par la Bibliothèque nationale d’Israël. Le conservateur en charge du projet, Stefan Litt, aime d’ailleurs à mentionner que parmi cette collection se trouve notamment « l’original de son testament littéraire demandant à son ami qu’il brûle tous ses écrits ».

Le feuilleton juridique

À cette initiative : la Bibliothèque nationale d’Israël qui avait récupéré l’œuvre au terme de la longue bataille juridique mentionnée plus haut.

Cette dernière débute après la mort de Brod, en 1968, qui lègue l’œuvre de son ami à sa secrétaire, Esther Hoffe. Il lui demande de transmettre les documents à la bibliothèque de Tel-Aviv, néanmoins elle choisit de les garder et les cache. Une partie est chez elle, une autre dans un coffre en Israël et enfin dans un autre en Suisse. À la mort de la secrétaire, ce sont ses filles qui héritent du trésor. Commence alors une bataille juridique entre ces dernières et l’État d’Israël. D’un point de vue universitaire, plusieurs pays vont se déchirer les ayant droits de l’héritage de Kafka et Brod.

En 2016, la Cour Suprême accorde les droits de propriété à la Bibliothèque nationale d’Israël. C’est à la suite d’une décision de la justice suisse qu’une partie des archives se trouvant dans un coffre-fort en Suisse, a été remise en mai 2019 à la Bibliothèque nationale d’Israël, à Jérusalem.

Que pourrez-vous découvrir en ligne ?

Il est vrai que la plupart des documents récupérés avaient déjà été publiés par Brod. Nous pouvons par exemple citer le texte du premier roman inachevé de Kafka intitulé Préparatifs de noces à la campagne. Donc aucun texte inédit dans les feuillets retrouvés en Suisse.

Cependant, les archivistes de Jérusalem ont eu droit à deux surprises sur des petits bouts de papier : « Nous avons découvert des dessins inédits ni signés ni datés mais que Brod avait conservés dont un portrait de la mère de Kafka et un autoportrait », raconte Litt.

De plus, un cahier bleu contenant nombre de documents fut également surprenant ! Dans ce dernier, Kafka a écrit en hébreu, et paraphe de sa signature habituelle « K ». Il est judicieux, pour l’anecdote et pour conclure notre article, de préciser que dans l’un des textes écrits dans ce cahier, datant de 1920, il demande en hébreu à sa professeure de ne pas se fâcher pour les fautes dans ses devoirs « car je suis déjà fâché pour nous deux ».

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— Aline Jamme

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