Le mapping vidéo, prouesse artistique et technologique
Cette pratique mêlant monuments et projections vidéo a fleuri cet été 2018. De la cathédrale d’Orléans en passant par celle d’Amiens, ces spectacles immersifs ont sublimé de prestigieux monuments français pendant toute la période estivale. Retour sur le festival Constellations de la ville de Metz afin de découvrir ce concept mettant l’architecture à l’honneur.
Festival Constellation
La cathédrale Saint-Étienne de Metz a été mise à l’honneur par l’artiste Yann Nguema lors du festival Constellations de cet été 2018. Durant plusieurs semaines et pour une durée de quinze minutes à chaque fois, ce monument s’est vu affublé d’effets 3D, projections vidéo et lasers, alors qu’une musique psychédélique était diffusée. Le clou du spectacle consistait en l’apparition du Graouli, le monstre légendaire de la ville. Cette performance a été réalisée grâce au mapping, une technologie alliant projections vidéo et spectacle de son et lumière. Le mapping peut être interactif, comme cette exposition de TeamLab, un collectif japonais spécialisé en mapping, où les tableaux évoluent selon les déplacements des spectateurs.
Fonctionnement du mapping
Cette forme d’art demande, pour être spectaculaire, une technologie de pointe qui s’articule, selon la société Prestans spécialisée en conception de mapping, en plusieurs étapes :
- Il faut effectuer un relevé de la façade pour disposer de tous les détails du bâtiment ;
- Un graphiste utilise ce fichier pour créer les premières animations ;
- Une projection-test est prévue pour vérifier si le relevé est suffisamment bon ;
- Ensuite vient la création graphique à proprement parler en suivant un story-board ;
- Finalement, il faut prévoir le matériel adéquat et toute la logistique.
Selon cette société, « quelques minutes de vidéo peuvent rapidement prendre un long mois à produire ». La conception d’un mapping demande beaucoup de temps et d’efforts. Dès lors, rien d’étonnant à ce que ce type de performance coûte cher. On tourne facilement autour des 20 000€ HT pour un mapping simple avec un seul vidéoprojecteur. La durée de la vidéo ainsi que la quantité de matériel utilisé font varier le prix.
Succès
Selon Nicolas d’Ascenzio, en charge du parcours numérique du festival Constellations et interviewé par Le Monde, « le côté numérique et monumental de ces projets remporte un succès incroyable auprès du public. Ce sont les nouveaux feux d’artifice ». Il ajoute que, dans le cadre de ce festival, le mapping n’était qu’un « produit d’appel pour découvrir d’autres choses ». En effet, le caractère monumental de ces projections permet de rendre certains clichés viraux et de rapidement créer un engouement. Les selfies des touristes deviennent facilement « instagrammables » grâce aux motifs colorés des mappings. Les spectateurs ont également tendance à faire des vidéos du décor qu’il leur est parfois possible de faire évoluer. Ce succès se vérifie sur Instagram où le #TeamLab a été diffusé plus de 238 000 fois. Les réseaux sociaux jouent donc un rôle non négligeable dans le succès de cet art.
Certains musées ont compris le potentiel du mapping pour s’inscrire davantage dans la modernité. Ainsi, le Château d’Auvers-sur-Oise a totalement revu sa scénographie et propose désormais, grâce à des animations sonores et visuelles, de raconter l’histoire des peintres impressionnistes de la région. Delphine Travers, directrice du musée, confirme que « ce changement a permis à notre musée de passer dans le XXIe siècle ».
Cependant, Nicolas d’Ascenzio et Yann Nguema estiment que le concept peut vite lasser le public étant donné que l’on retrouve souvent les mêmes effets dans chaque projet de mapping. Selon Yann Nguema, « on a tendance à voir et revoir les mêmes effets multicolores sur tous les bâtiments de France. […] Les gens vont finir par s’habituer et par devenir plus exigeants ». Il souhaite proposer à nouveau des performances en intérieur, plus impressionnantes (voir TeamLab), afin de ne pas perdre 15 à 20 % des effets visuels en extérieur.
Le mapping est une technologie polyvalente permettant de cristalliser temporairement une création artistique sur une surface choisie. Son succès, dû à son caractère impressionnant ainsi qu’aux réseaux sociaux, exige un perpétuel renouveau afin de ne pas tomber brutalement dans l’oubli. Les applications de cette technologie sont nombreuses : festival, mariage, concert, etc. Il convient néanmoins de prévoir un budget à la hauteur du spectacle.
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— Jean Cheramy