Espagne : le piratage de livres numériques en hausse pendant le confinement
En septembre, l’Observatoire espagnol sur le piratage et les habitudes de consommation de contenu numérique a publié son rapport annuel, axé sur l’impact du confinement sur le piratage.
Confinement et hausse de la lecture, légale ou non
Le rapport annuel montre un changement drastique des chiffres à partir du 15 mars 2020, date qui marque le début du confinement en Espagne. En effet, la seconde quinzaine de mars voit les ventes de livres physiques chuter de 80 % par rapport au début du mois.
Et pourtant, il est clair que le confinement a donné le temps aux lecteurs de se plonger dans de nouveaux ouvrages. Une hausse du temps de lecture quotidien donc, qui rime cependant avec une hausse du nombre d’ebooks consultés de façon illégale, c’est-à-dire au détriment du secteur de l’édition.
En effet, durant la première semaine de confinement, le nombre de personnes consultant des sites pirates a augmenté, en passant de 19 à 25 % des internautes interrogés (selon les chiffres fournis dans le cadre du rapport annuel par le cabinet de conseil GfK).
Les sites contrefaisants pullulent sur Internet et leur offre paraît à première vue attrayante. Ces sites proposent des ebooks en accès gratuit parce qu’ils ont été volés à leurs auteurs. Aussi, une fois téléchargé, un fichier frauduleux peut être partagé facilement, par e-mail par exemple ou sur les réseaux sociaux, car il est léger. C’est cette possibilité de distribution illimitée en un clic qui est vraiment dangereuse pour les ayants droit, par rapport au format papier.
Un manque d’information
José Manuel Rodríguez Uribes, ministre de la Culture, reste pragmatique. Certes, le confinement n’est pas représentatif de la situation normale, qui reflète une baisse généralisée du piratage d’environ 15 % en Espagne depuis environ cinq ans, mais il ne faut pas baisser la garde.
S’il faut le rappeler, chaque contenu piraté, c’est-à-dire utilisé sans l’autorisation de son auteur, correspond à un manque à gagner pour l’industrie qui le commercialise légalement. Sont principalement touchés par le piratage les secteurs de la musique, de l’audiovisuel, du livre et des jeux vidéo.
Au total, il s’agit de milliards d’euros et de milliers d’emplois perdus. Concernant plus précisément l’industrie du livre, la hausse du piratage pendant le confinement correspondrait en Espagne à une perte d’environ 230 millions d’euros.
De ce fait, les autorités sont décidées à continuer la prévention et à instruire les jeunes sur la propriété intellectuelle et les risques d’Internet. En effet, malgré la bonne volonté du gouvernement, un grand nombre de personnes ne sont pas encore au fait de la situation.
40 % des Espagnols interrogés avouent ne pas savoir reconnaître une plateforme légale ou illégale. Aussi, plus de la moitié d’entre eux estiment ne faire de mal à personne en utilisant les offres des sites pirates, en ce qu’ils payent légalement leur connexion Internet.
Finalement, il est malheureux que cette hausse de la lecture numérique pendant le confinement (qui a augmenté de 7 h à 8 h 30 par semaine pour les lecteurs réguliers), ait plus profité aux sites pirates et aux géants de la lecture en ligne, qu’aux librairies indépendantes qui font pourtant aujourd’hui des efforts pour numériser leur offre.
Bien entendu, l’Espagne n’est pas seule dans cette situation, le piratage n’étant pas connu pour son respect des frontières géographiques.
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— Nausicaa Plas