Jellybooks : de la recommandation de livres à l’analyse d’habitudes de lecture

La start-up Jellybooks a récemment annoncé sa décision d’abandonner son service de recommandation de livres pour se consacrer entièrement à l’analyse des habitudes de lecture. Avec son projet Reader Analytics, la société a déjà rassemblé un grand nombre d’informations pour tous types d’éditeurs. Focus sur cette start-up innovante et sur les résultats de ses analyses.

À ses débuts en 2012, la start-up Jellybooks proposait un unique service : faire découvrir aux lecteurs de nouveaux livres, en fonction de leurs goûts. Sur une plateforme dédiée, l’utilisateur pouvait ainsi constituer sa bibliothèque numérique. Si l’idée est intelligente, elle n’est pas vraiment révolutionnaire. C’est pourquoi la start-up a ensuite développé un autre projet, baptisé Reader Analytics, dont le but est d’analyser le comportement des lecteurs. Dans le courant du mois de juillet, Jellybooks a annoncé vouloir suspendre sa première activité pour se consacrer uniquement au développement de son outil d’analyse.

Des ebooks gratuits pour collecter des données

Pour encourager les lecteurs à se soumettre à ses enquêtes, Jellybooks leur propose des ebooks gratuits. En échange de cette offre, le lecteur accepte que des données sur son comportement soient collectées, comme le nombre de pages lues, la vitesse de lecture, l’influence de la couverture sur le choix du livre, etc.

On pourrait s’interroger sur la pertinence de ce projet sachant que les leaders du marché du livre numérique comme Amazon, Google et Apple disposent déjà d’outils de ce type. Mais Jellybooks se distingue par le partage des données récoltées avec les éditeurs, au contraire des géants du marché.

Fort de ces analyses, Jellybooks dispose donc d’un grand nombre d’informations sur les habitudes de lecture. Son fondateur, Andrew Rhomberg, n’est d’ailleurs pas avare en partage de ces résultats, comme il l’a montré en 2016, à l’occasion d’une table ronde organisée à Madrid sur le thème « Qui sont les lecteurs numériques et quelles sont leurs habitudes de lecture ? » (relire notre article à ce sujet).

Jellybooks

Les informations transmises aux éditeurs

Toutes les informations collectées sur un livre sont en effet transmises à la maison d’édition qui l’a édité, dans le but de jauger son succès potentiel. Certains éditeurs prestigieux font d’ailleurs appel à ces services, comme Penguin Random House, Simon & Schuster, Cambridge University Press et MIT Press. Si la start-up mène ses recherches avant la publication de l’œuvre dans la majorité des cas, elle tente aussi parfois de comprendre pourquoi un livre ne s’est pas vendu et comment améliorer ses résultats lors de sa sortie au format poche.

Aider les auteurs à diffuser leurs livres

Lors d’une récente interview pour le blog de Jane Friedman, Andrew Rhomberg s’est également confié sur ce que son entreprise a appris au cours de ses recherches. Une question importante a ainsi été soulevée, celle de savoir si les Reader Analytics pourraient jouer un rôle dans la décision d’un éditeur d’acquérir ou non un livre. Selon lui, la probabilité pour que cela arrive est très faible, et il ne souhaite d’ailleurs pas que Jellybooks joue ce rôle, préférant voir son entreprise agir comme un évangéliste qui aiderait les auteurs à diffuser les livres, plutôt que comme un juge.

À ce propos, Rhomberg affirme que « le but est d’aider les auteurs à atteindre leur potentiel maximum, et de les aider à comprendre pourquoi tel livre n’a pas atteint le public visé. La façon dont l’entreprise travaille avec les éditeurs est très centrée sur cet aspect. »

La couverture, plus importante qu’on ne le pense

product-analytics-0À propos de la couverture, Andrew Rhomberg souligne d’ailleurs qu’elle influence souvent bien plus les lecteurs qu’ils ne le pensent. Cependant, il n’y a pas de formule magique pour une bonne couverture : il ne s’agit pas seulement de sortir du lot, elle doit être appropriée au public visé, doit correspondre au titre, à la description, etc. Elle doit également soulever des attentes, sans créer de faux espoirs.

Le bouche à oreille aussi serait très fortement influencé par la couverture. En effet, les gens savent qu’ils seront jugés sur ce qu’ils recommandent, et ils seront ainsi inconsciemment plus enclins à conseiller un livre avec une belle couverture.

Les non-fictions lues moins rapidement

Jellybooks a déjà travaillé sur un grand nombre de genres différents, de la fantasy aux thrillers, en passant par les biographies et les romans policiers. Cette expérience permet de mettre en évidence certaines tendances : les romances sont ainsi généralement lues plus rapidement, et les biographies plus lentement. Rhomberg explique à ce propos que les non-fictions sont généralement difficiles à analyser, car ces livres sont souvent achetés pour être lus « un jour », ils ont donc un degré important d’optionalité.

Enfin, le fondateur de Jellybooks donne un ultime conseil : une fin trop brusque peut avoir un effet très négatif sur le facteur de recommandation du livre. Si les « cliffhangers » sont intéressants, il faut donc éviter d’en abuser ; les 10 ou 20 dernières pages doivent réellement servir de conclusion.

jellybooks-logo

Au vu de ses clients prestigieux et de la pertinence des résultats des recherches menées, Jellybooks semble être un bon partenaire pour les auteurs et les éditeurs. Reste à savoir si la start-up continuera de proposer un outil actualisé et efficace, sans souffrir de la concurrence des géants de l’édition numérique. En attendant, les lecteurs intéressés par le projet peuvent participer à une campagne et recevoir ainsi un ou deux livres numériques en échange du partage de leurs données de lecture.

Raphaël Dahl

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— Rédaction

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